Une Louve à Paris

Avant la fin de l’année, la Louve proposera des produits de qualité à des prix raisonnables sur 1500 mètres carrés du dix-huitième arrondissement de la capitale.


Une coopérative de consommateurs, mettant chacun la main à la pâte et accédant en échange à des produits de qualité à bas coût… C’est le principe de la Louve, ce supermarché coopératif en gestation dans le 18ème arrondissement parisien, qui fait déjà parler de lui depuis quelques mois.

Tom Boothe et Brian Horihan, les deux Américains à l’origine du projet, évoquent le fonctionnement des crèches parentales ou encore les coopérative ouvrières françaises du 19ème siècle, comme la Bellevilloise. Mais c’est à New York qu’ils ont trouvé leur modèle. A Brooklyn, Park Slope Food Corp fonctionne sur ce principe depuis… 1973 et compte 16 000 membres.

Installé à Paris depuis 2002, Tom, diplômé d’une école de cinéma où il a rencontré son acolyte Brian, y mène une vie de bohème, gagnant sa vie en donnant des cours d’anglais, de dégustation de vins – sa passion – et de cinéma. « C’est pour répondre aux attentes de gens comme moi, précaires mais amateurs de bonnes choses, que j’ai imaginé la Louve », précise-t-il.

Cinq fois moins de salariés qu’un supermarché standard

Depuis le début, les New-Yorkais de Park Slope Food Corp leur prodiguent leurs conseils. Après la création de l’association « Les amis de la Louve » et d’un premier groupement d’achats en 2011, la Société coopérative de consommateurs (SCS) voit le jour début décembre 2014.

Les membres de la coopérative acquièrent des parts d’une valeur 100€ et s’engagent dans le même temps à quelques heures de travail par an.

A raison de 2000 à 3000 membres, la taille qui doit permettre d’atteindre l’équilibre financier, cela permet au magasin de fonctionner avec cinq fois moins d’employés qu’un supermarché standard de la même taille. Pour la Louve, qui devraient distribuer environ 2000 produits (alimentaires mais pas seulement, majoritairement bio et en circuit court mais pas exclusivement), cela correspond à un ratio d’un salarié pour 500 personnes. Ce sont précisément les économies réalisées sur la masse salariale qui permettent de vendre les produits, triés sur le volet selon des critères de qualité exigeants, à des prix défiant toute concurrence, accessibles y compris aux bénéficiaires des minima sociaux. Ces derniers, qui peuvent acquérir des parts de la Louve au prix préférentiel de 10€, représentent d’ailleurs de 5 à 10% des quelque 750 membres déjà embarqués dans l’aventure.

Bientôt des louveteaux en régions et en Europe ?

Pour entrer en possession du local, près de 1500 mètres carrés actuellement en construction rue des Poissonniers dans le 18ème arrondissement parisien, la Louve doit réunir 1 M€, dont 15% de fonds propres. En plus des 50 000€ apportés par la Ville de Paris, Paris Initiative Entreprises (du réseau France Active), la fondation Macif et la Région Ile-de-France, ce sont les souscriptions qui doivent lui permettre d’atteindre cette somme.

« Mais ça n’est pas facile de demander de l’argent pour quelque chose qui n’existe pas encore », témoigne Tom, qui annonce néanmoins déjà 100 000€ récoltés. Moins facile encore de trouver comment impliquer concrètement les 750 membres. Ce sera chose aisée lorsque le magasin sera ouvert (à une date dictée par la fin des travaux, avant la fin de l’année 2015). Mais pour l’heure, l’un des enjeux consiste à éviter de décevoir les premiers adhérents, les plus militants et les plus désireux de s’impliquer dans le fonctionnement du projet.

Car il est essentiel que les membres s’approprient réellement le concept et le lieu. « Chacun doit se sentir réellement chez soi, insiste Tom. C’est vraiment ce que l’on ressent dans le magasin new-yorkais ». A la Louve, pas questions de « consommateurs », trop passif, ni de « clients », remplacés par « propriétaires ».
Bien sûr, aucun dividende ne sera distribué et tous les bénéfices seront ré-investis dans la structure. En revanche, à terme, un poste dédié à l’essaimage pourrait être créé grâce à des partenaires financiers. Une vingtaine de villes (dont Bordeaux, Marseille, Oslo, Bruxelles…) ont d’ores et déjà manifesté leur intérêt pour monter des projets similaires.

LA LOUVE

Dominique Pialot et Pascal de Rauglaudre

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