Ulterïa : remettre l’entreprise au cœur de la vie
Ulterïa est l'aboutissement d'un chemin démarrant par une menuiserie avant devenir un écosystème d'activités aux principes innovants. Ils sont 130 ulteriens évoluant ensemble avec un même objectif : travailler en collectif pour le bien commun.
Ulterïa est un projet de reprise, à l’origine, de Mobilwood, puis de création d’un écosystème d’activités aux principes innovants. Comment est née et a cheminé cette idée sur votre territoire ?
Alexis NOLLET : Ulterïa est un chemin.
Sébastien, mon associé, et moi avons repris Mobil Wood en 2006. C’était à l’époque une menuiserie industrielle de 30 salariés pour 2M€ de chiffre d’affaires environ. Mobil Wood fabriquait et fabrique toujours du mobilier d’agencement de magasins. Nous avons développé l’entreprise en accompagnant le développement des magasins bio. Nous avons également investi le zéro-déchet et sommes devenus leader dans les solutions de vente en vrac. Cela s’est fait par croissance organique et par croissance externe pour nous amener en 2015 à un groupe qui faisait 10 M€ de CA environ. Cette année-là, une entreprise américaine propose de racheter notre entreprise, dans le but de s’implanter en France.
Cela nous a amené à vraiment nous questionner sur le sens que nous voulions donner à notre démarche, et notre conscience écologique grandissant, nous avons préféré continuer l’aventure, mais en allant plus loin, avec l’objectif de créer un écosystème encore plus vertueux qu’auparavant.
Nous nous sommes engagés dans une démarche « d’écologie intégrale », c’est-à-dire une écologie à la fois environnementale, économique et sociale, visant à prendre soin aussi bien de la terre que des Hommes qui la peuplent. D’un projet entrepreneurial, nous sommes arrivés à une vision sociétale de notre action d’entrepreneur.
Ulterïa s’est beaucoup développé avec notamment une usine, une école, un centre de formation et une maison éco-citoyenne. Qu’en est-il à ce jour et quelle vision avez-vous de son développement ?
Aujourd’hui, Ulterïa compte 180 collaborateurs pour 25 M€ de chiffre d’affaires. Dans les 3 territoires où nous sommes implantés (Bourgogne, Bretagne et Nouvelle-Aquitaine), nous avons pour ambition de créer des lieux autour de nos entreprises pour engager la transition écologique/sociétale. Remettre l’entreprise au service du bien commun, c’est maintenant ce qui fait sens pour nous.
C’est en Bourgogne, berceau historique d’Ulterïa que nous sommes le plus avancé. Nous avons acheté, en 2017, un terrain de 10 hectares pour y créer un lieu qui remet l’entreprise au cœur de la vie. Qui puisse servir de locomotive à la transition écologique. Et recentrer son rôle sur l’intérêt général, le bien commun.
Sur ce terrain, nous avons construit une usine pour Mobil Wood qui est extrêmement innovant en matière de construction durable. Nous avons choisi les principes du « craddle to craddle » (qui signifie « du berceau au berceau », par opposition à une construction « du berceau à la tombe », dont tous les matériaux seraient à jeter une fois le bâtiment démoli).
Le « craddle to craddle », forme d’écoconception des produits, postule qu’un produit (ou ici un bâtiment) fabriqué doit pouvoir, une fois recyclé, donner naissance à nouveau au même produit, selon une logique d’économie circulaire. La ferme d’Ulterïa s’est également installée et la chèvrerie produit depuis 2 ans de bons fromages de chèvre bio.
Les premiers coups de pelle du bâtiment de notre crèche et école Montessori seront donnés avant l’été ! Et la maison de la transition suivra, un centre de formation aux questions de transition mais aussi la maison des habitants du territoire
Quel est le mode de gouvernance mis en place et en quoi sert-il le projet?
La gouvernance d’Ulterïa a beaucoup évolué. D’un point de vue management, nous avons cheminé en testant plusieurs formes d’organisation non-hiérarchique de manière à favoriser l’autonomie, la responsabilité et la subsidiarité. Nous mettons en oeuvre les principes d’intelligence collective en nous aidant beaucoup de facilitation et coaching. D’une entreprise dirigée par 2 cofondateurs, en quelque sorte tout puissants, nous sommes arrivés aujourd’hui à une gouvernance multipartite.
En 2018, nous avons créé une fondation actionnaire à laquelle Sébastien et moi avons donné 10% de nos actions. La fondation actionnaire a une gouvernance désintéressée (un conseil d’administration). Elle est présente au comité stratégique d’Ulterïa et a droit de veto sur toute décision qui ne respecterait pas la mission et les valeurs d’Ulterïa. Une représentante des collaborateurs est également dans l’organe principal de gouvernance d’Ulterïa ainsi que 2 fonds à impact (Quadia et Noves).
C’est donc l’alliance des fondateurs, d’une fondation, des collaborateurs et de la finance à impact qui décident ensemble. Impact, long-terme, écologie intégrale et résilience étant les principaux guides de leur décision.