Petite leçon d’entrepreneuriat responsable, par Patagonia

Pionnier et icône de l’entrepreneuriat responsable, Yvon Chouinard signe avec son neveu et directeur du marketing Vincent Stanley, présent à ses côtés depuis la création de Patagonia il y a 40 ans, « Un business responsable, les leçons tirées de 40 ans d’expérience de Patagonia ».

Nous avons rencontré Vincent Stanley lors de son passage à Paris pour la promotion de ce mode d’emploi de l’entreprise responsable.


Une bande de copains s’adressant à leurs clients comme à des amis

« Nous avons écrit ce livre pour toutes les entreprises qui fabriquent ou font fabriquer des choses, pour les salariés, les ONG, les jeunes… On l’a voulu très bref et pratique, organisé autour de cinq thèmes essentiels : la santé, les employés, les clients, les communautés et la nature. » L’ouvrage se termine par une check-list destinée à vérifier que tous les ingrédients d’un business durable sont bien réunis. Ce qui fait son intérêt, c’est qu’il s’agit de « recettes » éprouvées avec succès par une entreprise.
Patagonia se distingue à ses débuts en inventant un matériel (notamment des pitons d’un nouveau genre) pour une escalade plus respectueuse de la nature, à une époque, les années 1960 et 70, où ce loisir connaît un vrai boom aux Etats-Unis. Un article de 12 pages rédigé en 1972, « The whole natural way of climbing », rédigé par Patagonia se diffuse dans tout le pays et au-delà. « A cette époque, on s’adressait à nos clients comme à des amis, se souvient Vincent Stanley, et on essaie de continuer ».

Le passage au coton 100 % bio, un tournant dans la vie de l’entreprise

Quinze ans plus tard, Patagonia pénètre le marché des vêtements de sport. « Un secteur nettement plus difficile que nous ne le pensions », reconnaît-il. En 1988, les employés du magasin de Boston tombent malades quelques jours après l’ouverture en raison de produits toxiques contenus dans les textiles. La décision de basculer en 18 mois l’intégralité de son approvisionnement en coton écologique marque un tournant dans l’histoire de l’entreprise.
Depuis, la prise de conscience en matière de business responsable a progressé, chaque business school a élaboré un programme dédié, et tout un nouveau langage a été créé pour parler du sujet… Chez le consommateur, le mouvement a commencé avec la nourriture et les produits de soin avant de s’étendre à d’autres catégories.


Se servir de Patagonia pour inspirer d’autres entrepreneurs

La façon dont l’état d’esprit d’une bande de dix copains grimpeurs a survécu dans une entreprise qui emploie aujourd’hui 1800 employés et affiche un chiffre d’affaires de 600 M$ interpelle.
« Aujourd’hui, l’entreprise n’en est plus là, nous avons recruté de vrais professionnels, des diplômés de MBA, des transfuges d’autres sociétés… », raconte Vincent Stanley. A plusieurs occasions, les Chouinard auraient pu vendre, assure-t-il, mais ils ont préféré se servir de leur réussite pour démontrer à d’autres qu’il est possible d’être une entreprise responsable et de gagner de l’argent. »
Il y a 3 ans, Patagonia s’est par exemple engagé, avec 60 autres marques (dont Adidas, H&M, Levi’s ou Nike), dans une démarche sectorielle « pour un secteur de l’habillement responsable » : « C’est plus facile si plusieurs entreprises prennent des initiatives similaires au même moment, cela peut notamment permettre de faire des économies d’échelle, et d’accélérer l’acceptation des changements par les consommateurs. »

Une relation complexe à la croissance

Vincent Stanley reconnaît que Patagonia entretient avec la croissance une relation complexe. Trop rapide, elle est dangereuse aussi bien pour les salariés (notamment via l’arrivée massive de nouvelles recrues encore peu imprégnées de l’esprit maison) que pour les clients. D’ailleurs, la distribution des produits est volontairement limitée à un nombre restreint de points de vente.
Mais si Patagonia n’hésite pas à utiliser la publicité pour faire passer ses messages iconoclastes, son business est loin d’en pâtir. Ainsi, le chiffre d’affaires 2011 atteint un record malgré (ou grâce à ?) la campagne « N’achetez pas cette veste/Do not buy this jacket ».
D’ailleurs, il n’est pas simple de contrôler cette croissance. « En Europe, où la marque est encore récente, et la population plus sensible aux pratiques responsables, elle est très forte », reconnaît Vincent Stanley.
De quoi faire des émules, qui pourront s’inspirer de ce petit vademecum de l’entreprise responsable…

Yvon Chouinard et Vincent Stanley, Un business responsable, les leçons tirées de 40 ans d’expérience de Patagonia
Editions Vuibert, 2013.

Dominique Pialot & Pascal de Rauglaudre

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