Olivia Gay – Violoncelliste au cœur des forêts
La violoncelliste Olivia Gay porte un projet unique intitulé “le silence de la forêt”. L’idée : inviter des spectateurs à découvrir la musique autrement, au cœur des bois ou des sites naturels. Une initiative artistique et citoyenne dont les recettes sont reversées à différents projets de préservation des forêts.
Entrepreneurs d’avenir : Vous êtes violoncelliste et concertiste et vous êtes née dans les Vosges, au contact de ses forêts. Vous vous êtes toujours arrangée pour ne pas vivre en ville. Vous vivez actuellement près de la forêt de Fontainebleau. Pourriez-vous nous parler de cet appel de la forêt qui fait de vous une artiste pleinement inspirée par la nature, tant dans vos œuvres, que dans vos projets ?
Olivia Gay : J’ai en effet grandi entre musique, nature et chevaux. Lorsqu’on se dédie à une carrière de musicien, notre vie est très rapidement occupée entre la scolarité, le conservatoire, le travail de l’instrument … il reste peu de place pour autre chose.
J’ai eu la chance de naître dans une région où la nature est très présente et de profiter des cadeaux que les saisons m’offraient : Neige, champignons, balades, baignades …
D’autre part, ma deuxième passion était (est toujours) les chevaux. J’ai eu le bonheur d’en avoir un à moi assez jeune, il est devenu mon meilleur ami et a occupé les temps libres de mon agenda d’adolescente.
Passer du temps, le plus souvent à cheval, dans la nature et la forêt en particulier était donc mon moyen de me ressourcer, de laisser mon esprit et mes sens libres. Très souvent je me surprenais en train de chanter intérieurement les morceaux que je travaillais au violoncelle, au rythme des sabots de mon cheval. Ce travail presque inconscient m’aide à m’imprégner des œuvres musicales et à en faire mûrir l’interprétation.
Très tôt dans ma carrière je me suis demandé quel était l’essentiel pour moi en tant qu’humaine et comme artiste. J’ai toujours souhaité que mes projets musicaux, notamment mes programmes de disque, soient vraiment personnels, authentiques, qu’ils racontent quelque chose au delà de la musique. J’aime les choses vraies, brutes et très vite il s’est avéré que tout naturellement, mes thématiques de disque tournaient autour de ma fascination pour les grands espaces, des musiques traditionnelles liées intimement à une terre etc …
La musique, les artistes ont souvent été inspirés par la nature. Votre dernier album « Whisper me a tree », l’est. Pourriez vous nous donner quelques exemples qui vous ont aussi peut être inspiré ? Et comment cette inspiration est traduite dans votre album.
Beaucoup des grandes œuvres d’art qui traversent le temps sont inspirées par la nature. Des plus grands peintres au plus grands poètes en passant par toutes les formes d’arts anciennes ou contemporaines, la Nature est un sujet inépuisable.
La musique n’est bien sûr pas en reste, citons par exemple Le Chant de la Terre de G. Mahler, Les Océanides de J. Sibelius, Les Quatres Saisons de A. Vivaldi, Clair de Lune de C. Debussy, Jeux D’Eau de M. Ravel, Le Carnaval des Animaux de C. Saint Saëns, Les chants d’oiseaux d’O Messiaen et tant d’autres.
Les compositeurs décrivent la nature à travers la musique. Soit de manière directe en imitant certains éléments (l’eau, le vent, les oiseaux …) grâce aux capacités techniques des instruments de musique, par des éléments rythmiques ou encore des figurent musicales (corses pincées, son flûté, trémolos, glissades etc …), soit en recréant grâce au choix des harmonies une atmosphère qu’ils ont ressentie lors d’une douce matinée printanière par exemple ou encore pendant une tempête de neige.
Dans mon album, on retrouve ces deux manières de mettre la nature en musique. Par exemple, le vent est décrit très concrètement dans la pièce intitulée « The Wind at McLaren Summit » de J.L Adams. D’autre part, l’atmosphère changeante d’une forêt est exprimée d’abord de manière extrêmement paisible puis plus agitée dans « Waldesruhe » de A. Dvorak.
J’ai conçu l’album comme une journée dans la nature avec la forêt au centre du programme. La journée commence le matin dans une atmosphère légère et positive, avec le vent, les papillons … elle continue dans la forêt où l’on touche également du doigt les légendes qui l’habitent, les elfes notamment. La journée s’assombrit ensuite avec la pièce de M. Richter « On the Nature of Daylight » qu’il a écrite comme une « méditation sur la violence » et que je me suis appropriée pour délivrer le message d’alerte quant à la préservation des forêts.
Le disque continue dans la brume et les tourments que peuvent parfois entraîner le soir, et enfin arrive la nuit plus apaisée.
Vous avez lancé un projet intitulé « le silence de la forêt », qui consiste a inviter les spectateurs à profiter d’un concert au cœur des bois et des sites naturels. Ce projet a été motivé à la suite des méga feux en France, en 2021. Les gains sont ensuite versés au fonds de dotation de l’ONF « agir pour la forêt ». C’est un projet inédit. Pourriez vous nous le présenter ?
Suite aux mega feux qui ravagent chaque été de plus en plus d’hectares de forêt, j’ai eu envie d’agir et mon premier réflexe a été d’enregistrer « Whisper Me A Tree », comme une ode à la forêt et un cri d’alerte quant aux dangers qu’elle encourt.
Suite à cet enregistrement, j’ai eu envie d’aller plus loin, de jouer ces œuvres directement en forêt, dans l’écrin qui a inspiré les compositeurs. Amener le public en forêt pour une expérience immersive et sensorielle, amener le concert classique en forêt grâce à un système de scène transportable sur laquelle trône un grand piano de concert qui nous permet, ma pianiste et moi même, de donner des récitals violoncelle – piano. Cette idée m’a amenée à me rapprocher de l’ONF pour discuter de la faisabilité d’un tel projet et de fil en aiguille, un partenariat est né avec son fonds de dotation « Agir pour la forêt » dont je viens d’être nommée Ambassadrice.
Mon souhait est d’utiliser mon art comme un vecteur émotionnel afin d’aider à souligner le fait que la forêt est bien évidemment essentielle à la vie des uns et des autres, mais l’est aussi pour l’inspiration artistique.
J’espère pouvoir rapidement inviter des artistes de tous horizons, danseurs peintres sculpteurs … partageant ce même besoin de nature, sur scène et autour de la scène afin d’élargir le spectre artistique.
La levée de fonds pour « Agir pour la forêt » associée à mon projet est avant tout un acte personnel, puisque je lui reverse 60% des royalties et des bénéfices que je perçois par la vente de mon album. D’autre part, lors de mes concerts forestiers, j’invite le public et les organisateurs de l’événement à donner eux mêmes.
Ce projet finance en partie la réhabilitation de la forêt d’Echarcon, dans l’Essonne, où les arbres sont sérieusement touchés par la maladie de l’encre, un champignon qui tue les châtaigniers et les chênes. Ce champignon se déplace dans le sol et est favorisé par le dérèglement climatique. Comment l’ONF lutte contre ce fléau ?
J’apprends énormément sur les forêts depuis le début de cette aventure et je m’en réjouis, c’est absolument passionnant ! Je ne suis malgré tout pas forestière et je ne m’aventurerais pas à parler à la place de l’ONF sur les techniques mises en place mais je sais en tous cas, que l’ONF lutte contre l’encre du châtaignier et toutes les maladies liées au changement climatique en replantant des essences plus diversifiées, plus résistantes et mieux adaptées à la sécheresse, en allant parfois les chercher dans des régions plus arides.
Comment peut-on soutenir votre démarche ? Quels rôles peuvent jouer les entreprises ? et les citoyens.
En venant aux concerts ! ☺️ Bien sûr, j’encourage tous ceux qui le peuvent, citoyens et entreprises, à s’engager pour une cause environnementale et en particulier celle des forêts, à donner quand c’est possible, à en parler autour de soi …
Pour « Le Silence de La Forêt », je suis actuellement à la recherche de mécénat afin d’encourager la pérennité de ce projet tout récent et de l’aider à se développer davantage. Les fonds alloués à la culture sont de plus en plus minimes et ceux attribués à la sensibilisation sur la question de la préservation des forêts sont quasiment inexistants. Le mécénat d’entreprise aiderait donc à couvrir les frais de fonctionnement de mon initiative, à inviter plus d’artistes sur scène, à rendre le coût de la prestation moins lourd pour les organisateurs.
Cela me permettrait également de voir plus loin, de commander des œuvres à des compositeurs par exemple, de réaliser des vidéo clips mettant en lumière ce lien étroit entre art et nature.
Quand seront vos prochains concerts dans la forêt ? Comment s’y rendre ?
Voici quelques dates mais la liste n’est pas encore complète :
– 30 mars – Inauguration des travaux de mise en valeur forestière et du refuge littoral de la Réserve Naturelle Régionale de Sainte – Lucie (solo) (occitane Port la Nouvelle)
– 31 mars – Inauguration du nouvel observatoire du Pey de la Blet en forêt domaniale de de Barre – de – Monts (Solo) (Vendée)
– 7 avril – 19h30 Champignelles – Inauguration du campus Ma.Na, campus international de création et formation professionnelle autour de l’artisanat (avec Aurélien Pontier pianiste)
– 23 avril – 16h Festival des forêts légendaires » , Forêt de Broceliande (île et Vilaine Bretagne). Base de loisirs de Saint – Malo de Beignon avec Aurélien Pontier pianiste
– 13 mai – 18h Forêt de Rambouillet, sur le site de « La table du Roi » (Yvelines Île de France) concert organisé par le village des Bréviaires et l’association Lipsart avec Célia Oneto Bensaid pianiste
-10 juin – 19h Forêt de Sainte Apolline dans le cadre des Nuits des Forêts avec Aurélien Pontier pianiste
– 24 juin – 18h Forêt de Barbizon (Seine et Marne) dans le cadre d’une exposition du musée départemental des peintres de Barbizon avec Célia Oneto Bensaid pianiste
– 30 juin – Évènement privé pour France Valley dans la forêt de la Saucelle (proche Senonches) avec Aurélien Pontier pianiste
– 11 juillet – 21h Cap Ferret Music Festival (Nouvelle Aquitaine Gironde) – Parc de la Maison Forestière avec Célia Oneto Bensaid pianiste
– 12 juillet – Forêt de la Teste – de – Buch (Nouvelle Aquitaine Gironde) Date anniversaire du départ de l’incendie 2022
– 1 août – 19h « Festival Musique et Nature en Bauges » à la Chartreuse d’Aillon à Aillon – le Jeune (Auvergne Rhône Alpes Savoie) avec Aurélien Pontier pianiste
– 6 août – 17h Forêt de la Praille (Plateau d’Hauteville) dans le cadre du Festival de Théâtre d’Hauteville (Auvergne Rhône Alpes Savoie) avec Célia Oneto Bensaid pianiste
– 17 septembre – 17h à Trêves, concert organisé par la Filature du Mazel et l’association ASC. Forêt d’exception de l’Aigual (occitanie Guard) avec Célia Oneto Bensaid
Toutes les dates et toutes les infos se trouveront très bientôt sur mon site internet