L’entrepreneuriat engagé : vers un modèle économique plus responsable et durable
Dans « Entrepreneur engagé » (EMS Management et Société), Alexia de Bernardy met en lumière l’essor de l’entrepreneuriat à impact, alliant ambition et éthique pour relever les défis sociaux et environnementaux. Elle partage des conseils et témoignages pour inspirer des modèles d’affaires plus responsables.
Entrepreneurs d’avenir : Votre livre « Entrepreneur engagé » édité chez EMS Management et Société est sorti récemment. Il mêle à la fois des conseils utiles pour tous les entrepreneur·e·s ou celles et ceux y aspirant et un parti prix, celui de poser un modèle d’entrepreneuriat qui s’engage pour un monde meilleur au service de valeurs fortes. Selon vous, quelle place prend désormais l’entrepreneuriat à impact dans l’univers plus large de l’entrepreneuriat ?
Alexia de Bernardy : L’entrepreneuriat à impact est devenu une nécessité, au point qu’on peut se demander s’il fait encore sens, à notre époque, d’être entrepreneur sans viser un impact positif. Créer son entreprise dans ce cadre, c’est redéfinir les priorités en plaçant l’impact social, environnemental et sociétal au cœur des modèles économiques. Cela démontre que l’ambition et l’éthique peuvent coexister.
Ce type de projets répond aux attentes croissantes des citoyens, des consommateurs et des gouvernements en quête de solutions durables. L’impact des lois est également colossal en termes de créations d’entreprises dans des secteurs tels que le recyclage, l’énergie ou les transports. C’est pourquoi on observe un afflux d’investissements dans ces domaines. Certains porteurs de projets deviennent d’ailleurs des “entrepreneurs à impact” par opportunité, à la suite de nouvelles réglementations qui créent des marchés inédits.
À l’exception de ces profils émergents, les entrepreneurs engagés font souvent face à des difficultés communes qui nécessitent des pratiques spécifiques, ce qui en fait un terrain d’étude particulièrement intéressant.
Qu’est ce qui caractérise un·e entrepreneur·e engagé.e ?
Le terme “engagement” revêt plusieurs sens. D’une part, comme dans mon premier ouvrage “Moteurs d’engagement“, l’engagement caractérise un leadership qui génère davantage de motivation au travail. Ici, le terme “engagé” fait écho à mon fil rouge de multi-entrepreneure engagée depuis 20 ans “pour un monde meilleur”.
Il existe des entrepreneurs dits engagés “by design”, dont l’activité est intrinsèquement positive pour le monde. Par exemple, un indépendant qui anime la Fresque du Climat dans ses formations, un commerçant qui ne vend que des produits en vrac, ou encore un industriel qui révolutionne les transports ou apporte une avancée majeure en matière de santé.
Un·e entrepreneur engagé peut également être simplement guidé par ses valeurs, une quête de sens et une vision durable, même si son offre n’a pas directement un impact positif sur le monde. Par exemple, tout dirigeant qui contribue à l’emploi local, favorise l’épanouissement ou l’éducation de ses salariés, et mobilise son collectif autour d’une ambition plus grande que lui-même, même si son entreprise est une société d’informatique.
Quels conseils essentiels avez-vous à donner à toutes et tous ceux qui entreprennent ?
L’ouvrage détaille 28 facteurs clés de succès, répartis en 3 parties étayées par 40 témoignages : comment savoir si une idée est une bonne idée, comment la développer, et comment prendre soin de sa vitalité en tant qu’entrepreneur engagé. Il contient des conseils techniques indispensables, notamment sur la nécessité de se poser la question de l’utilité réelle de ce que l’on souhaite créer vis-à-vis de clients potentiels. Pour répondre à cette question, il est essentiel d’aller rapidement se confronter au marché, c’est-à-dire mettre une version brouillon de son offre entre les mains de clients potentiels pour observer ce qu’ils en font.
Il y a également des conseils comportementaux. De nombreux témoignages d’entrepreneurs à succès et d’investisseurs insistent sur l’importance de l’humilité (de Frédéric Mazzella, fondateur de BlaBlaCar et Dift, à Éric Larchevêque, fondateur de Ledger). L’humilité permet d’apprendre des autres et d’écouter les clients pour construire l’offre dont ils ont besoin, et non celle que l’on a envie de créer. Ce sont ces deux conseils qui distinguent les entrepreneurs qui cherchent à avoir raison de ceux qui veulent réussir.
Quel·les sont celles et ceux qui vous ont le plus marqué dans les rencontres que vous avez pu avoir ?
Je n’ai interviewé que des personnes qui m’impressionnent, toutes pour des raisons variées, qu’il s’agisse de l’ambition, de l’impact ou de l’originalité de leurs projets. Des entrepreneurs comme Maïlys Cantzler (Homnia), qui transforment des défis personnels en solutions pour le bien commun, ou Brice Cruchon (Dracula Technologies), qui montrent que la technologie peut servir l’environnement, témoignent d’un mélange de vision audacieuse et d’exécution rigoureuse. La nouvelle génération, comme Émilie Korchia (MyJobGlasses) ou Cyrielle Callot (Les Alchimistes), démontre qu’il reste encore tant de nouveaux modèles à inventer. Mais je crois que le parcours de Frédéric Mazzella et sa personnalité m’ont particulièrement marquée, à la fois par la justesse et la finesse de ses stratégies (sa société BlaBlaCar est une licorne valorisée à plus d’un milliard d’euros) et par son humilité.
Vous dirigerez une session importante du Parlement des Entrepreneurs d’avenir, dans le cadre de l’Université de la terre, le 15 mars à l’UNESCO, sur le thème « Audace et engagement : Faire de ses valeurs un moteur d’action » avec des dirigeants assez exceptionnels. Que voudrez-vous qu’ils partagent avec le public ?
Au travers des 40 interviews que j’ai eu le plaisir de réaliser pour cet ouvrage, j’ai aimé partager des histoires humaines et de convictions, qui se transforment en réalités économiques. Là aussi, j’ai hâte de découvrir qui se cache derrière ces dirigeants engagés, pour comprendre les raisons de leurs actions, la manière dont ils ont contourné ou supprimé un obstacle pour aller au bout de leurs idées, quels apprentissages ils tirent de leurs décisions, etc. C’est ce type de partage qui élève les dirigeants exceptionnels au rang de “role models”, donnant envie au plus grand nombre de passer à l’action à leur tour.
Retrouvez Alexia de Bernardy à l’Université de la terre les 14 & 15 mars 2025
>> Inscription ICI <<