Le Comité Colbert, un acteur de la diplomatie culturelle et de l’engagement durable des Maisons de luxe françaises

Bénédicte Epinay, directrice générale du Comité Colbert, explore le rôle des Maisons de luxe françaises dans la diplomatie culturelle, en particulier avec la Chine, et leur engagement en faveur de la responsabilité sociale et environnementale à travers des événements comme "Jeux de mains".

 

Entrepreneurs d’avenir : Plus que jamais et au moment où les tensions économiques et diplomatiques entre l’Europe et la Chine se raidissent, les Maisons de luxe françaises et le Comité Colbert qui les représente, ont une place, un rôle dans l’exercice d’une forme de diplomatie culturelle française, vis-à-vis de la Chine. Pourriez-vous nous aider à décrypter ces relations ? Et quel rôle le Comité Colbert a dans cette « diplomatie » culturelle ?

Bénédicte Epinay : Cette volonté de faire rayonner le luxe et l’art de vivre français figure au premier rang des missions du Comité, avec la préservation des savoir-faire. Sa raison d’être en est d’ailleurs l’expression. « Promouvoir passionnément, transmettre patiemment, développer durablement, les savoir-faire et la création française pour insuffler du rêve ». Le Comité Colbert joue ce rôle de « diplomate culturel » depuis sa création en 1954 à l’initiative de Jean-Jacques Guerlain. Nous sommes alors quelques années après la seconde guerre mondiale et l’urgence est de rouvrir les grands marchés à l’international. La puissance du collectif Colbert permet cette audace de dire « ensemble, nous sommes plus forts ».

Ainsi, c’est ensemble et en pionnières que les Maisons s’engagent vers de nouveaux marchés, en portant la voix du luxe à travers une diversité d’événements qui mettent en valeur l’excellence française dans le respect du dialogue culturel.

Si aujourd’hui, la Chine est un marché important pour les Maisons du Comité Colbert, le dialogue entre les deux pays débute dès 2003. Le point d’orgue, deux ans plus tard, est l’exposition au Plaza 66, à Shanghai, intitulée « Le luxe français s’expose en Chine ». Une véritable démonstration de savoir-faire. L’association se rend aussi en Inde où elle signe, dès 2006, un Memorandum of Understanding avec la FICCI, sorte de Medef indien. L’objectif est alors limpide : « Susciter la création d’homologues à l’étranger, qui partagent les mêmes valeurs d’excellence, de respect des savoir-faire et de création, afin de défendre ensemble un secteur à valeur ajoutée. »

À partir de 2010, le cap est mis sur davantage de destinations – Bahreïn, Brésil, Corée, Émirats arabes unis, Liban et Turquie, notamment –, sans oublier les grands marchés habituels. A chaque fois, le Comité Colbert s’appuie sur les ingrédients éprouvés du passé pour proposer tour à tour des démonstrations d’artisans, des dialogues de savoir-faire, des conférences, des expositions. Autant d’échanges qui soulignent l’intérêt du secteur pour la diversité et la richesse du dialogue des cultures.

 

Vous avez d’ailleurs organisé en novembre dernier l’événement « Jeux de mains » à Shanghai pour célébrer notamment les 60 ans des relations diplomatiques entre la France et la Chine. Quels étaient les objectifs de cette rencontre et quel en est le bilan ? Quelles ont été les maisons les plus engagées lors de cet événement ?

Le Comité Colbert a en effet organisé en novembre dernier à Shanghai une exposition dans le cadre des célébrations autour des 60 ans des relations diplomatiques entre la France et la Chine. Intitulé « Jeux de mains », cet événement a été pensé comme un dialogue entre les artisans français de nos maisons et des maitres d’art chinois, partageant tous une maitrise exceptionnelle de leurs savoir-faire. L’exposition a ainsi réuni 17 tableaux correspondant aux 17 maisons du Comité Colbert participantes. Jeu de précision et de regard, de poésie et de couleurs… Chacun de ces tableaux est venu faire la démonstration de l’excellence du savoir-faire français (joaillerie, cuir, broderie…) avec, en regard, l’expertise d’un artisan chinois. Partageant une même table de travail et utilisant parfois des outils identiques, les artisans ont tous surmonté la barrière de la langue pour communiquer dans une admiration réciproque.
Ces rencontres uniques méritaient une curation et une scénographie tout aussi exceptionnelle… Celle-ci a été imaginée par l’artiste et designer chinoise Jiang Qiong Er, qui place le dialogue au cœur même de sa création. « Il existe deux domaines dans le monde où il n’y a pas de fossé culturel, la beauté et l’amour. Nous comprenons tous la beauté, qui est une question d’esthétique, et l’amour, qui est une question d’émotion ».
Autre symbole de ce pont jeté entre Asie et Occident, l’exposition a pris place dans une maison au cœur du quartier historique magnifiquement restauré de Zhang yuan dont les bâtiments -de style Shikumen- allient éléments occidentaux et chinois, créant un contraste saisissant avec les gratte-ciels environnants, symbole du Shanghai moderne.
Plébiscité par un large public de plus de 10 000 personnes, cet événement s’inscrit dans l’ADN du Comité Colbert et de cette vocation de diplomate. Dès 2005, des échanges soutenus avec la Chine se sont concrétisés par une exposition des savoir-faire français à Shanghai. Plus récemment, pendant l’épidémie de Covid, le Comité Colbert a créé un mini program sur WeChat, invitant les consommateurs chinois à une promenade digitale inédite au sein de 66 de ses maisons, visitée par 146 millions de personnes.

 

Le Comité Colbert est maintenant un fidèle partenaire de l’Université de la terre, qui aura lieu les 14 & 15 mars 2025 autour du thème « Nature = Futur » et qui fêtera ses 20 ans à l’Unesco. Quel est le rôle et l’action des Maisons de luxe dans le changement de rapport au Vivant ? quels seraient les exemples à retenir ? et comment concilier excellence et responsabilité ?

La question de la responsabilité sociale et environnementale est à l’agenda de toutes nos Maisons. Parfois, depuis plus de 20 ans. Les valeurs du développement durable sont, par nature, consubstantielles à notre industrie : le respect du créateur, de son travail comme celui du client, la transmission des savoir-faire, la qualité et la pérennité des produits, la préservation des matières premières, la vision entrepreneuriale inscrite dans le temps long de l’histoire. Ces valeurs portent le sens de notre raison d’être citée précédemment.

Depuis, quatre ans, les maisons du Comité Colbert ont même entrepris, via un rapport annuel, de partager les engagements en matière de développement durable. Depuis plus longtemps encore, une Commission dédiée réfléchit à notre responsabilité collective. Cette année, nous allons pour la première fois, produire un rapport CSRD comme une synthèse des rapports de nos maisons. C’est un cap supplémentaire dans le partage de cette connaissance utile à tous. Car face au chemin à parcourir pour améliorer notre impact sur la société, nous sommes convaincus que le collectif est une véritable force et une chance pour l’avenir.

Aujourd’hui, face à l’urgente nécessité de protéger les écosystèmes naturels, de participer à la lutte contre le dérèglement climatique et de développer des perspectives d’avenir pour les jeunes, le Comité Colbert s’engage à prendre toute sa part. La préservation du vivant est évidemment fondamentale et c’est le sens de notre deuxième participation à l’Université de la terre. Tous nos produits et services sont l’assemblage de matières, de talents et de créations d’exception qui prennent ou s’inspirent de la nature qu’il nous faut donc protéger et restaurer.

 

Vous organiserez le 14 mars à l’Unesco, une session intitulée, « La nature, source infinie d’émotions, » durant laquelle des représentants de vos Maisons pourront partager avec le public de l’Université de la terre, la manière dont la nature nourrit leur savoir-faire. Quel est le message que vous souhaitez faire passer à travers ces témoignages ?

Dans les différents métiers du luxe, la nature est en effet source infinie de création : les fleurs, la vigne, le coton, la soie, les terroirs, le climat, les sols… Mais cette source infinie doit malheureusement aujourd’hui intégrer la question de la finitude du monde et de ses ressources. La préservation et la régénération ne sont plus une option mais une nécessité comprise par tous. A travers des rencontres, nous croiserons les regards, les cultures, les parcours. Nous apprendrons comment se transmet la passion de l’exceptionnel. Nous comprendrons ce qui fait sens pour celles et ceux qui font. Quelle importance revêt le sourcing, comment naissent le précieux et l’enchantement qu’il procure.

 

Retrouvez Le Comité Colbert à l’Université de la terre les 14 & 15 mars 2025
>> Inscription ICI <<

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


La période de vérification reCAPTCHA a expiré. Veuillez recharger la page.

Je m'inscris à la newsletter