Egis : Comment grandir et s’engager pour une transition durable

Entrepreneurs d’avenir : Laurent Germain, vous êtes Directeur général d’Egis, groupe international de conseil, d’architecture, d’ingénierie de la construction et d’exploitation qui œuvre dans le monde entier pour des territoires plus équilibrés, plus durables et plus résilients. Le groupe EGIS a beaucoup grandi ces dernières années. Pourriez-vous revenir sur cette forte croissance ? Est-elle compatible avec votre ambition d’accompagner les territoires pour un avenir plus durable ?

Laurent GERMAIN : Nous sommes très fiers du chemin parcouru, et notre ambition est claire : intégrer le top 10 mondial. Cet objectif nous permettra d’amplifier notre impact, en particulier en participant à des grands programmes qui favorisent la transition écologique et énergétique (TEE).

Notre forte croissance s’explique par notre engagement à innover et à investir dans des projets durables. Depuis 2020, Egis a doublé de taille, atteignant en 2023 un chiffre d’affaires consolidé de 1,9 milliard d’euros, soit une progression de 28 % par rapport à 2022. Cette performance, qui devrait pour 2024 approcher des 2,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, repose sur une croissance organique forte (13 % en 2023) et sur l’acquisition d’un nombre significatif d’entreprises stratégiques ces dernières années, notamment dans les secteurs des énergies renouvelables et des infrastructures bas carbone.

Nous avons inscrit la « sustainability » au cœur de cette dynamique. Fin 2024, 45 % de notre CA contribue de manière significative à la transition écologique et énergétique. Par ailleurs, notre croissance s’accompagne d’une politique d’exclusion de projets incompatibles avec nos engagements environnementaux et sociétaux.

L’engagement d’Egis reflète une vision où croissance économique et durabilité s’alignent pour des impacts positifs durables. Nous restons déterminés à aligner notre expansion avec nos objectifs de durabilité.

Votre groupe s’est fixé un objectif d’émissions Net-Zero d’ici 2050 : quelles sont les prochaines étapes et les actions concrètes pour espérer atteindre cet objectif ambitieux ?

Nous avons obtenu, en fin d’année dernière, la validation par la Science Based Targets Initiative de notre trajectoire de décarbonation liée à notre fonctionnement interne, ce qui atteste de la robustesse et de l’ambition de nos engagements et objectifs.

Des actions très concrètes ont été mises en place dès 2024. On peut citer l’augmentation de la production et de la consommation d’énergies renouvelables, la mutualisation de certains sites de bureaux pour optimiser les consommations, et la conversion d’une partie de la flotte de véhicules à l’électrique ou à des carburants à faibles émissions, comme les biocarburants.

Egis est un leader mondial en matière d’infrastructure, de mobilité et d’énergie durable puisque près de 70% de votre activité se déploie hors de nos frontières. Comment parvenez-vous à diffuser des pratiques vertueuses, dans des pays ou les pratiques le sont moins ?

Nous collaborons étroitement avec les gouvernements locaux et les parties prenantes pour adapter nos solutions aux contextes spécifiques de chaque pays. Nos projets intègrent désormais des critères de durabilité et de responsabilité sociale.

En partageant notre expertise et nos meilleures pratiques, nous contribuons à l’adoption de normes plus exigeantes, quel que soit le contexte. Par exemple, nos principes d’écoconception ou nos initiatives pour lutter contre le changement climatique ont vocation à être appliquées de manière systématique grâce à un référentiel global appelé Act4ecodesign, que nos équipes opèrent en France ou à l’international. Cette approche globale, intégrée à notre signature technique et déclinée progressivement dans chaque région du monde et pour toutes nos activités, s’appuie sur un ambitieux programme de formation et nous permet de viser un impact positif, même dans des contextes où les standards environnementaux restent en développement.

Vous avez été nommé en juillet Président de la Fondation INSA : quel peut être le rôle de la formation dans la dynamique d’une transition se voulant juste et durable ?

La Fondation INSA, que je préside depuis 2023, est l’un des vecteurs clés pour former une génération de leaders aptes à relever les défis de la transition écologique. En encourageant des programmes pluridisciplinaires et des innovations pédagogiques, elle prépare les ingénieurs de demain à concevoir des solutions justes et durables. Ce rôle de catalyseur reflète la conviction que la formation est essentielle pour transformer nos sociétés et bâtir un futur à la fois responsable et résilient.

Aujourd’hui, plus de la moitié de la population mondiale est citadine, avec une projection à 70% d’ici 2050. (Banque Mondiale) Les enjeux environnementaux et territoriaux liés à l’étalement urbain seront donc un sujet central de l’Université de la terre les 14 & 15 mars 2025, et vous interviendrez dans la cadre d’une discussion autour de l’aménagement de nos territoires. Quel sont les projets d’Egis qui répondent à ces défis liés à l’étalement de nos villes, et à un futur décarboné et revégétalisé ?

Egis joue un rôle clé dans des projets emblématiques qui répondent aux défis d’une urbanisation durable, en compensant notamment les effets délétères de l’étalement urbain.

Par exemple, à Paris, entre la Porte de la Chapelle et la Porte d’Aubervilliers, où le nouveau quartier Hébert sort progressivement de terre, l’enjeu environnemental s’est imposé comme une priorité absolue. Le projet s’inscrit d’ailleurs dans les objectifs du Plan Climat de la ville de Paris. Aux côtés de la SNEF, Egis apporte son expertise en ingénierie bioclimatique pour transformer une friche urbaine de plus de 5 hectares, jusque-là dédiée au stockage ferroviaire, en un espace mixte durable. C’est un projet qui intègre des principes d’éco-conception, de biodiversité et de résilience énergétique.

Non loin de là, dans le cadre du concept de ville apaisée (lire notre livre blanc “Slow City”), nous assurons la maîtrise d’œuvre du projet Promenade Bleue à Asnières-sur-Seine. Ce projet d’aménagement fluvial vise à rétablir un lien entre la ville et la Seine en créant un parcours de 800 mètres dédié aux piétons, avec zones végétalisées et espaces de respiration. Ici aussi nous avons une approche qui valorise le temps long et conjugue bien-être, respect de la biodiversité et fonctionnalité urbaine.

À Riyadh, nous pilotons l’un des programmes de végétalisation les plus ambitieux dans un environnement extrême. D’ici 2030, ce projet vise à augmenter la couverture végétale de 7,6 %, atteignant 541 km², et à offrir un ratio d’espace vert exceptionnel de 28 m² par habitant (contre 1,7 m² aujourd’hui). Nos équipes accompagnent la stratégie et le suivi de centaines de projets de reboisement, incluant la plantation de 7,5 millions d’arbres endémiques, grâce à une plateforme SIG dédiée pour une gestion optimisée.

Ces initiatives, auxquelles s’ajoutent le développement de solutions innovantes comme la phytoremédiation pour dépolluer les friches tout en préservant la biodiversité, ou encore le projet Landboost® pour intégrer la nature dans les constructions urbaines, illustrent assez bien notre ambition de transformer les défis de l’urbanisation en opportunités.

La Fondation d’entreprise d’Egis, est aujourd’hui dédiée à la lutte et à l’adaptation aux conséquences des changements climatiques et à la promotion d’une démarche de transition. Vous avez notamment lancé un challenge international étudiant Team up for Climate qui permet de stimuler l’émergence d’actions locales et collectives pour s’adapter face aux risques climatiques. Quelle est votre intention derrière ce challenge, et quels en sont les résultats observés après 3 éditions de ce dernier ?

Le challenge Team up for Climate vise à mobiliser les jeunes talents autour de solutions innovantes pour l’adaptation au changement climatique. Depuis le renouveau de la Fondation Egis en 2021, l’adaptation aux impacts du changement climatique est au cœur de nos actions. Après seulement trois éditions, nous avons eu la satisfaction de constater une très forte participation, avec jusqu’à 1 700 participants lors de la dernière édition, et des projets prometteurs et concrets mis en œuvre localement. Ces jeunes, qu’ils soient ingénieurs ou étudiants d’autres disciplines, font preuve d’une grande créativité en proposant des solutions d’adaptation ancrées dans les réalités locales. Ces initiatives répondent dès aujourd’hui aux changements déjà en cours, qui continueront de nous affecter dans un avenir proche. Cela nous permet également de découvrir des talents exceptionnels, qui pourraient, qui sait, rejoindre Egis un jour, ou contribuer avec nous, d’une manière ou d’une autre, à construire le monde autrement.

Je tiens enfin à saluer les collaborateurs Egis, qui jouent un rôle clé dans cette initiative en tant que mentors volontaires au sein de la Fondation. Leur engagement personnel contribue à renforcer notre ambition de promouvoir une transition écologique inclusive et collaborative.

Retrouvez Laurent Germain à l’Université de la terre les 14 & 15 mars 2025
>> Inscription ICI <<