Après la malbouffe, agissons contre la malinformation !
Tribune d'Anne-Sophie NOVEL, journaliste docteur en économie
D’une année à l’autre, la défiance envers les médias ne faiblit pas. Dans un monde d’infobésité, alors que le Brexit ou les dernières élections américaines et l’arrivée de Trump à la présidence des Etats-Unis donnent tort aux analyses et pronostics du prétendu “quatrième pouvoir”, il devient urgent d’interroger le récit proposé par une profession qui, si elle s’interroge régulièrement sur les conditions d’exercice de son métier, remet rarement en cause sa vision du monde.
Pire, alors que nos modes de vie et nos organisations sociétales sont menacés par des défis de civilisation sans pareils, le nivellement par le bas du discours médiatique ne donne pas aux Français le sentiment de « faire société ». Un constat partagé par de nombreux professionnels pour qui le langage journalistique a différents effets destructeurs sur le moral de son audience. Pour la sémiologue Mariette Darrigrand, auteure de l’essai Comment les médias nous parlent (mal), les mots récurrents de l’actualité ont même un caractère stérile et une capacité à paralyser la seule chose qui compte véritablement : l’action.
Certes tous les médias ne se ressemblent pas : entre les chaînes d’information en continu et le journalisme d’investigation à la Médiapart, ou l’infodivertissement proposé par d’autres, de larges nuances existent et l’actualité des petites choses ne domine pas tous les supports. Reste que la concentration des médias dans les mains de quelques patrons de presse et les conditions de fabrication de l’information rendent souvent difficile le traitement de la complexité du monde. De fait, dans un monde soumis à une multiplicité de transformations en constante accélération (mondialisation, numérique, mutations économiques et sociales, disparition du vivant, changement climatique) il est peut-être temps de poser les questions – et fournir les réponses – autrement.
Il y a des entrepreneurs d’avenir, comme il peut y avoir des journalistes d’avenir
C’est la raison pour laquelle j’ai décidé il y a quatre ans de réaliser un travail documentaire qui entend analyser les raisons du malaise régulièrement exprimé par le grand public (et par les journalistes désireux de bien faire leur métier) envers les médias, avant d’effectuer un tour du monde des rédactions et supports qui essayent de proposer un journalisme plus vivant, plus responsable, plus en phase avec le monde qui vient, avec de nouvelles manières de voir, et de faire.
Journaliste freelance, j’ai aussi choisi mon métier par conviction, par désir de promouvoir un autre type d’information et fournir une grille de lecture sensible des enjeux du siècle. Je mesure chaque jour le défi auquel nous faisons face alors que je conçois, depuis toujours, mon métier comme un service public, comme une mission de médiation plus que de médiatisation. Ce parti pris n’est sans doute pas partagé, mais je suis persuadée que les mutations économiques et sociales actuelles sont telles que mon métier ne peut se contenter de simplement reformater son approche ou diversifier ses sources de revenus. Nous devons interroger notre rôle, notre ligne de conduite. Nous devons nous soucier du contenu dans un monde malade de surinformation. Nous devons expliquer plus que jamais, faire de la pédagogie, investiguer avec sérieux mais sans oublier d’offrir des pistes d’action, nous ne pouvons simplement continuer de mettre la plume dans la plaie, nous devons nous préoccuper aussi de celles et ceux qui les pansent…
Pour toutes ces raisons, “Les Médias, Le Monde et Moi” propose une réflexion aussi bien individuelle que collective sur notre rapport au monde, à l’information, et à ce qu’il nous faut préserver plus que jamais. C’est un “Moi” universel, qui fait le récit du vécu de sa protagoniste tout autant qu’il interroge le rapport que chacun peut entretenir avec l’information qu’il reçoit, et sa quête de sens dans un monde complexe…
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