COP 16 : L’OFB, acteur clé des négociations pour la préservation de la biodiversité mondiale
À la COP 16 à Cali, l’OFB a activement participé aux discussions sur la santé, les écosystèmes marins et les aires protégées. Bien que des avancées notables aient été faites, des défis demeurent pour atteindre les objectifs de l’Accord de Kunming-Montréal.
Entrepreneurs d’avenir : La 16e Conférence des Parties de la Convention sur la Diversité Biologique s’est tenue du 21 octobre au 1 novembre 2024 à Cali, en Colombie. Quels ont été les sujets de négociations suivis par l’OFB ? Etes-vous satisfaits des résultats ?
Office français de la biodiversité : La 16e Conférence des Parties (COP 16) de la Convention sur la Diversité Biologique s’est tenue à Cali, en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre 2024. L’Office français de la biodiversité (OFB) intervient aux côtés de son ministère de tutelle, le Ministère de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.
L’agence a suivi plusieurs sujets de négociation et a contribué à l’organisation d’une quinzaine d’évènements parallèles qui visent à donner à voir des actions concrètes pour protéger, conserver et restaurer la biodiversité en France et dans les outre-mers et soutenir des projets européens et internationauxde, en particulier dans les domaines de la santé, des écosystèmes marins, des aires protégées et de la gestion durable des espèces sauvages. Elle a par ailleurs signée et renouvelée plusieurs partenariats avec des acteurs nationaux et internationaux.
Concernant les résultats des négociations, nous pouvons nous réjouir de plusieurs avancées, sur les peuples autochtones, qui voient leur statut évoluer favorablement au sein de la convention ou sur le partage équitable des avantages tirés de l’exploitation des ressources génétiques.
Par ailleurs, on note l’adoption d’un plan d’action mondial sur la biodiversité et la santé, un sujet d’une importance croissante depuis la pandémie de COVID-19. Ce plan vise à freiner l’émergence de maladies zoonotiques, à prévenir les maladies non transmissibles, et à promouvoir des écosystèmes résilients. Cette décision, attendue depuis la COP 15, souligne l’interdépendance de la biodiversité et de la santé humaine et environnementale.
Un autre point marquant de cette COP a été l’adoption de la décision relative les Zones marines d’importance écologique ou biologique (EBSAs). Après plus de huit années de négociations, l’adoption de nouveaux mécanismes pour identifier et mettre à jour les EBSAs marque une avancée décisive. Ces zones, essentielles à la biodiversité marine mondiale, bénéficieront désormais de processus de catalogage et de suivi basés sur les dernières avancées scientifiques. La gestion durable des espèces sauvages a également été au cœur des discussions, avec l’adoption d’une décision encourageant la surveillance accrue, le renforcement des capacités, et la participation active des peuples autochtones, des communautés locales et des femmes. Malgré ces avancées, certains points clés restent à finaliser, notamment le mécanisme d’évaluation de l’avancement vers les 23 cibles du Cadre mondial de Kunming-Montréal. Alors que 44 pays, dont la France, ont déjà soumis leur Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB), ce retard dans la mise en place d’un système d’évaluation mondiale pourrait ralentir l’atteinte des objectifs.
L’Office français de la biodiversité (OFB), en tant qu’organisme public chargé de la protection et la restauration de la biodiversité en France et en Outre-mer, a pu participer aux échanges. Quelle est la place de l’OFB dans le cadre de ces grands rassemblements internationaux et sont-ils propices à des avancées majeures ?
En tant que représentant de l’expertise scientifique et technique française, l’OFB appuie les négociations internationales sur la biodiversité et promeut des initiatives pour renforcer la protection et la restauration de la nature. Sa présence aux COP et dans les forums internationaux permet de valoriser les solutions innovantes françaises, comme la mise en œuvre de solutions fondées sur la nature, et de promouvoir la coopération entre acteurs institutionnels, ONGs, et gouvernements pour répondre aux défis globaux.
Lors de cette COP 16, l’OFB a signé deux accords : l’un de coopération avec l’Office Guinéen des Parcs Nationaux et Réserves de Faune, et l’autre avec la Convention sur les espèces migratrices (CMS). Ces accords s’inscrivent dans une volonté de renforcer les échanges techniques, notamment sur les corridors écologiques ou le prélèvement d’espèces sauvages d’encourager la collaboration en matière de conservation.
Le Directeur général de l’OFB a participé à plusieurs événements d’envergure, notamment sur les enjeux de la santé environnementale (One Health), la protection des espèces migratrices, et les aires marines protégées, trois sujets en résonnance avec les avancées de la COP. Cette participation a permis de souligner l’importance de la biodiversité pour la santé humaine et de mettre en lumière des approches exemplaires pour la protection des espèces.
L’OFB a par ailleurs multiplié les rencontres bilatérales, renforçant ainsi les liens avec des partenaires clés. Parmi les échanges notables, on compte des discussions avec la directrice générale de l’UICN, la présidente de la Commission mondiale des aires protégées (portant notamment sur le changement climatique et le risque incendie), le ministre de l’Environnement du Gabon (pour le renforcement des capacités), le Bénin, la République Centrafricaine, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la Thaïlande et des responsables environnementaux du Québec, de Madagascar, et d’autres pays. Ces échanges visent à coordonner les efforts en matière de biodiversité et à renouveler des partenariats stratégiques.
L’OFB a également organisé une réunion mondiale des agences de biodiversité, réunissant des représentants d’organismes similaires de la Chine, du Canada, de l’Allemagne, de l’Afrique du Sud, du Royaume-Uni et de la Colombie. Ce réseau, le “Global Biodiversity Agencies Network”, initié par l’OFB, constitue une plateforme essentielle pour structurer des actions concertées et favoriser le partage de bonnes pratiques à l’échelle internationale.
Outre sa participation aux négociations, l’OFB s’est impliqué sur le sujet des crédits biodiversité via le placement d’un agent au sein de l’International Advisory Panel on Biodiversity credits, qui a partagé son Cadre pour des marchés de crédits biodiversité à haute intégrité. L’OFB a également partagé les expériences françaises lors de 15 événements parallèles. Parmi ceux-ci figuraient des sessions sur la Coalition pour la Haute Ambition pour la Nature et les Peuples (objectif 3 sur le 30×30), le financement de la restauration des coraux, l’éducation à l’environnement, le mainstreaming, et des initiatives de financement innovant comme sur la conservation du Jaguar. Ces événements ont permis de souligner le rôle de la France en tant que moteur des efforts mondiaux pour une gestion durable des écosystèmes
Les COP sont des moments propices aux avancées concrètes, en permettant d’obtenir des engagements internationaux, mais leur succès repose sur la mobilisation des États, du secteur privé et des acteurs locaux. L’OFB continuera à s’engager aux côtés des ministères dans ces enceintes pour faire avancer les solutions communes indispensables à la préservation de la biodiversité.
Cette COP a lieu deux ans après la signature de l’Accord de Kunming-Montréal, qui définit le cadre de l’action internationale pour faire face à la crise de la biodiversité et prévoit notamment la protection de 30 % des terres et des mers d’ici 2030. Quelles sont les avancées en termes de protection ? Sont-elles suffisantes pour espérer atteindre cet objectif ?
Deux ans après l’Accord de Kunming-Montréal, qui appelle à la protection de 30 % des terres et des mers d’ici 2030, la COP 16 a permis de constater des progrès encourageants. Le nombre de pays ayant adopté une Stratégie et Plan d’Action Nationaux pour la Biodiversité (NBSAP) a fortement augmenté, traduisant leur engagement à respecter les objectifs du 30×30. À ce jour, 44 pays ont soumis de nouvelles stratégies alignées sur le cadre mondial de Kunming-Montréal, et près de 120 ont défini des cibles nationales spécifiques pour la biodiversité.
Cependant, de nombreuses stratégies nationales sont encore attendues, et les approches varient considérablement d’un pays à l’autre en termes de qualité et de rigueur dans la mise en œuvre. Ces différences posent des défis pour s’assurer que tous les engagements contribuent réellement à la conservation mondiale. Le rapport Protected Planet, publié lundi 28 octobre par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), rappelle que la superficie des aires protégées doit doubler sur terre et tripler en mer au cours des six prochaines années. Actuellement, seuls 17,6% des terres et 8,4% des mers sont protégés.