Planet-score : ouvrons les yeux sur nos achats

Entrepreneurs d’avenir : On commence à identifier sur nos produits du quotidien le Nutri-score, mais pas encore assez Planet-score. Pourriez-vous nous préciser ce qu’est Planet-score ?

Sabine Bonnot : Planet-score est un système d’évaluation environnementale qui fournit une information concrète aux consommateurs et aux producteurs sur la valeur environnementale des produits alimentaires, avec une appréciation globale en partie haute, et surtout avec 4 indicateurs clés qui permettent de situer les produits : l’usage de pesticides, les impacts sur la biodiversité, les effets sur le changement climatique, et (pour les produits alimentaires qui contiennent des ingrédients issus de l’élevage) un indicateur sur le bien-être animal. L’information est restituée sous la forme d’une étiquette destinée à être affichée sur les produits, aussi bien sur les emballages que sur les sites de e-commerce, ou les applications mobiles.

Cela permet d’informer les consommateurs sur l’impact environnemental des aliments, de la fourche à la fourchette (les ingrédients, leurs origines, les méthodes de culture ou d’élevage, les emballages ou encore le transport).

Au-delà de la transparence consommateur, Planet-score est aussi un outil mobilisé par les entreprises pour évaluer où se situent leurs enjeux et les impacts les plus importants, sur quelles gammes, quelles filières, quelles étapes des chaînes de valeur, et de prioriser les chantiers. Car derrière les étiquettes, il y a bien sûr des chiffres, qui permettent de piloter de manière opérationnelle et nuancée les démarches de progrès, et d’en rendre compte dans les bilans RSE notamment.

Quel type de produits concerne-t-il ? Combien de produits sont étiquetés à ce jour ?

Planet-score concerne tous les produits alimentaires, bruts et transformés. Nous travaillons aux côtés de plus de 300 marques, dans 12 pays. Plus de 150 marques communiquent sur leurs étiquettes, et plus de 80 les affichent déjà sur les emballages, en France comme dans d’autres pays européens. Environ 100 millions d’emballages produits étiquetés Planet-score sont déjà diffusés.

Nous travaillons avec des acteurs sur toute la chaîne de valeur, de l’amont à l’aval : coopératives et producteurs, fabricants (B2C et B2B), grossistes, distributeurs, restauration collective. Des TPE-PME aux grands groupes. Nous coopérons également avec des académiques et des centres de formation. UFC Que Choisir affiche Planet-score sur son application mobile gratuite (Quel Produit), sur plus de 130.000 produits alimentaires.
Au-delà des travaux réalisés sur la base des données précises des entreprises, nous avons également évalué plus de 800.000 produits alimentaires sur la base des données accessibles publiquement, pour appréhender et benchmarker le secteur en France et à l’international. Cela révèle de belles démarches de la part de certains acteurs, très divers d’ailleurs, et des marges de progrès importantes bien sûr.

Quels sont les critères évalués et comment les évaluez-vous ?

Nous avons développé une méthodologie complète et exigeante, qui intègre 25 paramètres dans le référentiel d’évaluation (cf. documentation panoramique; et replay). Elle prend en compte les impacts, mais aussi les contributions positives. Les systèmes de production agricole représentent en moyenne 85% des impacts totaux des produits rendus consommateur, c’est un élément souvent mal connu. Certains systèmes de production agricole sont des contributeurs positifs, il est important de le faire savoir également.
Les évaluations sont réalisées sur une plateforme (algorithme), sur la base des données fournies par les fabricants. Ces éléments (ingrédients, cahiers des charges et démarches qualité…) sont partagés sous accord de confidentialité, nous sommes garants de leur matérialité.
Depuis mai 2023, nous proposons également une évaluation de « transparence intégrale » qui associe, en plus de l’évaluation environnementale et du bien-être animal, des critères liés à la juste rémunération des producteurs, à l’origine des matières premières, ainsi qu’au caractère plus ou moins ultra transformé des produits. Il s’agit d’un travail de sincérité à 360°. (Voir Biocop se met à nu; Planet-score intégral)

Quelle est la gouvernance de Planet-score ? Qui sont vos partenaires référents ?

Né de la volonté d’un large collectif d’éclairer les pratiques environnementales de l’agroalimentaire, d’accélérer la transition agroécologique en la rendant visible avec de la nuance, Planet-score est structuré sur une double entité :
• une structure d’intérêt général (Fonds de dotation, régi par la Loi du 4 août 2008), à qui est confiée la marque Planet-score®, et qui est garant de l’intégrité et de la pertinence scientifique de la méthode. La gouvernance est assurée par des scientifiques, des experts et des associations. Il n’y a aucune entreprise, ni syndicat, ni filière, dans la gouvernance du Fonds. Les 27 scientifiques et experts du Fonds couvrent toutes les disciplines (agronomie, écologie, nutrition, sociologie, géographie, agro-économie, statistique…).
• une entreprise à mission, Planet-score SAS, chargée du déploiement opérationnel en France et à l’international, qui accompagne au quotidien les entreprises, de l’amont à l’aval, dans l’évaluation concrète de leurs produits et qui réalise l’appui à l’éco-conception et les formations des équipes.

C’est potentiellement une révolution si cette étiquette se généralise. C’est une manière concrète de chercher à améliorer son impact écologique. Comment faire grandir Planet-score ? D’autres pays ont-ils déployé ce type de mesures ?

Planet-score est déjà déployé auprès d’entreprises basées dans 12 pays. Et diffusé sur des emballages de produits dans les 27 pays de l’espace européen. La diffusion se fait grâce aux entreprises qui souhaitent avancer de manière sincère et le faire savoir, même quand leurs étiquettes sont améliorables. C’est le cas par exemple d’organisations exemplaires dans la transparence et la pédagogie qu’elles ont décidé d’offrir sur la totalité de leurs produits à marques propres, par exemple Picard, Monoprix, Greenweez, Franprix, Biocoop, La Vie Claire… Les marques nationales ne sont pas en reste, de nouvelles communications vont avoir lieu dans les semaines et mois qui viennent. Les choses vont en fait assez vite ! Sans le vouloir ni le planifier, nous sommes devenus le dispositif le plus déployé au niveau européen.

Des structures institutionnelles nous sollicitent également pour intervenir, par exemple la FAO tout récemment (voir article), la Commission Européenne et son centre de Recherche, etc.

De même que nous sommes innovants en termes de gouvernance, d’indépendance, de transparence, nous le sommes aussi pour le développement : il se fait de manière naturelle, ce sont les entreprises qui nous contactent, nous n’avons pas de force commerciale. Toutes nos énergies sont centrées sur le partage du sens et l’engagement dans l’action.

Pour nous faire connaître, nous bénéficions de la force du collectif dont a émergé cette étiquette anti-greenwashing (UFC Que Choisir, ONGs, scientifiques…), et de la mise en visibilité réalisée par les acteurs économiques engagés, à la fois les entreprises qui diffusent leurs étiquetages produits, mais aussi (par exemple) Mediaperformance, régie publicitaire BCorp, qui nous offre depuis plusieurs mois des espaces de diffusion video en GMS (Carrefour, Système U, Intermarché… voir article). Diamart et son jury d’experts RSE, qui nous ont décerné le Premier Prix du Retail for Good (voir article). Emery Jacquillat, co-fondateur des Entreprises à Mission, qui nous parraine depuis fin 2022 (voir article). Fabrice Bonnifet, président du C3D, qui soutient également notre démarche anti-écrans de fumée. Nous intervenons d’ailleurs dans une conférence en ligne pour le C3D le 25 avril (voir article).

Chaque personne, chaque organisation, chaque voix, peut apporter sa contribution. Il est également possible de contribuer, via des dons et du mécénat de compétences, au Fonds de dotation. Que ce soit pour œuvrer sur les sujets scientifiques, ou sur la diffusion des connaissances.

Bien sûr, il y a des verrous, des acteurs qui n’ont pas envie de remettre en cause le statu quo. Mais globalement, nous sentons un véritable souffle, une grande envie de sens, et un appel au changement à l’intérieur des entreprises. Nous sommes convaincus qu’elles font partie de la solution pour réaliser la mutation du secteur agroalimentaire. Une mutation nécessaire au regard de la contribution majeure de ce secteur au dépassement des limites planétaires. Une transformation que nous envisageons comme réellement positive pour tous les acteurs de la chaîne de valeur, des producteurs aux consommateurs.

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