French Impact : “Nous voulons doter l’ESS d’une bannière, à l’image de la French Tech”

Rassembler les entreprises, les collectivités et les associations sous une même bannière qui fédère l’ensemble des acteurs de l’innovation sociale. Voilà l’objectif de l’initiative "French Impact", impulsée par le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire. Interview de Christophe Itier, Haut-Commissaire à l’économie sociale et solidaire et à l’innovation sociale.

 

À l’instar de la French Tech, le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire impulse un nouveau mouvement, baptisé “Le French Impact”. Piloté par Christophe Itier, Haut-Commissaire à l’économie sociale, il a comme objectif de faire de l’innovation sociale un levier majeur de la transformation sociale du pays. Interview, co-organisée avec We Demain.

We Demain : Pourquoi avoir lancé le “French Impact” ?
Christophe Itier : Nous voulons doter l’économie sociale et solidaire, et plus largement l’économie de l’innovation sociale, d’une marque, d’une bannière, à l’image de la French Tech. Il y a cinq ans, les entreprises de la tech étaient sous les radars économiques, institutionnels et de l’opinion publique. La French Tech a permis de communiquer sous une bannière commune et de créer un écosystème de plus grande performance et visibilité de cette économie.

Nous voulons donc doter l’économie de l’innovation sociale d’une bannière similaire pour la faire sortir de son entre-soi. De manière à ce qu’elle ne soit plus une économie à part mais bien au cœur du développement économique et social du pays.

Comment cela va fonctionner ?
Nous faisons un constat : malgré l’argent public que l’on a pu consacrer aux défis sociaux de notre pays, les politiques publiques butent depuis des années sur des problèmes structurels : chômage de longue durée, chômage des jeunes, décrochage scolaire… Or, partout dans les territoires des entreprises, des associations ou des collectivités proposent des solutions pour répondre à ces défis.

Donc la promesse de French Impact c’est, partant de ce constat, de trouver et d’identifier des solutions locales pour en faire des solutions nationales. Et pour cela nous allons agir sur trois grands leviers principaux.

Premièrement, le levier financier : pour accompagner au mieux les entreprises innovantes à deux moments fondamentaux de leur croissance. D’abord pour l’amorçage – nous allons d’ailleurs lancer un premier fonds d’amorçage d’ici la fin de l’année. Puis pour le changement d’échelle : nous avons l’ambition de mobiliser un milliard d’euros sur la durée du quinquennat, en fonds publics comme privés.

Ensuite nous avons le levier réglementaire. Aujourd’hui quand on innove, on doit passer autant de temps à chercher à lever des freins réglementaires ou à dénouer des complexités administratives, qu’à lever des fonds. Or, dans deux tiers des cas, ce n’est pas la réglementation qui est à changer, mais seulement son interprétation ou sa surinterprétation.

À partir de la rentrée, nous allons lancer un réseau de “hackeurs publics” : ce sont des fonctionnaires, dans les ministères et à l’échelle régionale, qui feront en sorte de faciliter les relations entre les innovateurs sociaux et les pouvoirs publics. Ils auront une seule mission : lever les freins réglementaires qui bloquent l’innovation et le changement d’échelle en créant un couloir sanitaire réglementaire pour l’innovation.

Et le troisième levier ?
Le troisième levier repose sur les territoires, parce que cette économie de l’innovation c’est avant tout l’économie de la proximité. C’est pour cela que nous avons lancé le 3 juillet dernier un “Appel aux territoires” pour les écosystèmes territoriaux dynamiques en matière d’innovation sociale et environnementale, qui souhaitent être labellisés French Impact pour renforcer leur écosystème.

Il s’agit, dans tous les territoires, de réunir l’ensemble de la communauté de ceux qui innovent et qui contribuent à cette innovation sociale : les incubateurs, les associations, les collectivités, les entrepreneurs, les investisseurs…. C’est aux acteurs de dire “pour nous, ce territoire fait sens”. Ce processus de labellisation a vocation à favoriser l’émergence, le développement et l’essaimage des innovations sociales sur tous les territoires, ruraux ou urbains et de toutes tailles.

Nous demanderons également aux territoires candidats d’identifier trois défis environnementaux ou sociaux précis (ex : baisser de moitié le décrochage scolaire ou territoire zéro déchet d’ici 2022) ce qui permettra de mettre en tension tout l’écosystème pour relever ces défis et mesurer l’impact social.

La première vague de réponse est attendue pour le 22 octobre et il y aura des nouvelles vagues tous les trimestres de manière à labelliser une dizaine de territoires en France dans le courant de l’année 2019.

Le 12 juin dernier, vous avez dévoilé les 22 “Pionniers” de French Impact, comment les avez-vous choisi ?
L’objectif de ce premier programme du French Impact était d’identifier et d’accompagner les “licornes” de l’économie sociale et solidaire. Ce programme s’adressait donc aux entreprises de plus de 500K€ de chiffre d’affaire, avec plus de trois ans d’existence et un modèle économique robuste, prêt au changement d’échelle à l’échelle nationale.

Nous avons eu près de 200 candidats, 45 projets ont été auditionnés et 22 grands projets vont être accompagnés et chacun parrainé par un ministre !

Vous allez lancer d’autres “programmes” avec Le French Impact ?
Bien sûr, il y a beaucoup de programmes à imaginer et à lancer. Nous souhaitons par exemple développer des programmes thématiques liés à nos grands défis sociétaux : l’économie circulaire, le décrochage scolaire, l’économie inclusive, etc. Les entreprises innovantes, quelle que soit leur taille, pourront y répondre. Les territoires pourront également se mobiliser autour de ces défis.

Est-ce que des entreprises de l’économie conventionnelle pourront se porter volontaires ?
Oui. Le French Impact est une initiative nationale qui est destinée à fédérer tous les acteurs à impact social positif. Aujourd’hui de plus en plus d’entreprises cherchent à avoir un impact social et environnemental positif, comme les “entreprises à mission” par exemple. Toutes ces entreprises pourront faire partie de l’écosystème en finançant des projets, en développant des alliances avec des associations ou des entrepreneurs sociaux. Notre objectif est de créer le plus possible de synergies et de ponts entre l’économie traditionnelle et l’économie sociale et solidaire.

Que va-t-il se passer dans les prochains mois ?
Animer la communauté nationale et les écosystèmes locaux, imaginer et lancer des programmes thématiques, mobiliser toujours plus largement des acteurs en faveur de l’innovation sociale. En fait, le French Impact c’est démontrer et faire avancer ensemble toute cette puissance de transformation de cette économie sur le plan social et environnemental.

 

Sophie Colla

 

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