Marine Anton, l’entrepreneuse qui relocalise le textile
En 2013 Marine Anton a repris avec succès deux entreprises textiles en Auvergne-Rhône-Alpes. Cela lui a valu d’être récompensée aux derniers Trophées d’Entreprendre au féminin.
L’industrie textile a de l’avenir en France, ce n’est pas Marine Anton qui dira le contraire. En cinq ans, cette jeune entrepreneuse visionnaire a sorti de l’ornière deux entreprises textiles de la région Auvergne-Rhône-Alpes : Histoire de femme et Haase Innovation.
Sur l’ensemble des deux sites, elle est parvenue à sauvegarder une vingtaine d’emplois, et à en créer une vingtaine d’autres. Ce succès lui a valu de remporter le Trophée de la reprise d’entreprise, aux derniers Trophées d’Entreprendre au féminin, jeudi 17 mai dernier.
À la tête de ces deux entreprises, Marine Anton poursuit un objectif : développer le Made in France. Haase Innovation est un bureau d’études doublé d’un atelier de tricotage, situé à Manthes, près de Romans-sur-Isère, dans la Drôme. Les 15 salariés de l’entreprise y travaillent pour les plus grands stylistes parisiens. « La spécialité de Haase Innovation, c’est la création de matières et de tissu, comme le motif du velours. Nous sommes des commerçants artisans », affirme cette entrepreneuse née.
Histoire de femme, la seconde entreprise, est un atelier de couture installé au Coteau, près de Roanne, dans la Loire. 33 couturières y assemblent et repassent chaque jour des milliers de vêtements.
La technique + le commerce
L’aventure de Marine Anton, qui a grandi dans l’entreprise de couture de ses grands-parents, remonte au début des années 2000. Après son diplôme de Supdemod, l’école de la mode et du luxe de Lyon, elle est embauchée comme assistante modéliste chez Haase Innovation.
Marine gravit les échelons très rapidement, et se familiarise autant avec le commerce qu’avec la technique. Trois ans plus tard, elle devient responsable du bureau d’études, puis responsable de production pour la France et l’étranger.
En février 2013, l’atelier de confection Histoire de femme est placé en redressement judiciaire. Marine monte une offre avec l’aide d’une expert-comptable. Non sans culot, elle parvient à convaincre le tribunal de la laisser reprendre la société, tout en conservant son emploi de responsable à Manthes. « Le tribunal me prenait pour une arriviste, incapable de gérer un poste de travail », se souvient-elle.
Huit mois plus tard, c’est au tour de Haase Innovation d’être menacé. Marine monte à nouveau un dossier et investit toutes ses économies dans la reprise. Avec le soutien de son patron, elle reprend l’entreprise malgré les dettes. « Ces deux entreprises sont complémentaires, elles possèdent un savoir-faire pointu que je veux conserver et développer », assure-t-elle.
80 % de la production en France
Avec détermination, elle parvient à convaincre ses clients, les grands couturiers, de ne pas délocaliser leur production et de soutenir son activité. Certaines des grandes marques de la place de Paris lui ont donc confié la réalisation d’une partie de leur prêt-à-porter : Agnès b., Devernois, Balmain, le Slip français, mais aussi Sonia Rykiel, Givenchy, Yves Saint-Laurent…
Aujourd’hui, se félicite-t-elle, Haase réalise 95 % de sa production en France (le reste est délocalisé en Europe de l’Est), contre 20 % avant sa reprise.
En 2017, Marine a racheté la marque de prêt-à-porter Chrismas’s pour la développer avec une nouvelle styliste qu’elle a recrutée. Mais pour y parvenir, il lui faudra recruter encore du personnel, car ses carnets de commandes sont pleins : « Je suis obligée de refuser du travail et ça me fend le cœur. »