Le bio à prix juste pour le consommateur et le producteur
Avec une croissance à deux chiffres, Biocoop, le distributeur bio, multiplie les opérations pour faire la promotion des produits bio. Mais son engagement va bien au-delà, explique Claude Gruffat, son président.
Croissance de +13,4% en 2014, magasin éphémère sans emballage : l’époque est faste pour Biocoop, le distributeur bio. Claude Gruffat, son président, décrypte l’engagement de l’entreprise en faveur de l’environnement.
Entrepreneurs d’avenir – Que fait Biocoop pour l’environnement ?
Claude Gruffat – Depuis plus de vingt ans, nous pratiquons la vente en vrac pour supprimer les emballages et réduire la production de déchets. Et pour les produits auxquels ça ne peut pas s’appliquer, nous essayons de limiter les emballages à leur minimum. Nous mettons aussi l’accent sur le commerce de proximité, en poussant les magasins à s’approvisionner auprès de producteurs locaux pour réduire l’impact des transports et l’empreinte écologique associée.
Comment le bio peut-il être compétitif et sortir de l’image de bio pour les bobos ?
Mais le bio n’est pas que pour les bobos ! Il traîne encore une image qui n’est plus la sienne. D’abord il n’est pas cher : nous pratiquons un prix juste pour le consommateur et le producteur. Ce prix n’est pas le plus bas, il est calculé pour que le consommateur dispose de produits sans avoir tué le producteur avec des prix trop bas. Et puis il y a une distorsion de concurrence. Les produits conventionnels ne reflètent pas l’intégralité de leur coût, ils n’incluent pas les externalités négatives, la dépollution de l’air, de l’eau, des terres, les dépenses de santé publique, etc. Toutes ces factures environnementales sont gentiment archivées pour les générations futures. Ceci dit, comment rendre le bio encore plus accessible ? Par l’amplification de la consommation : quand le bio passera de 4 à 20 % de l’alimentation, les économies d’échelle diminueront son prix.
Chaque année on se félicite du doublement des surfaces agricoles en bio, mais elles restent quand même très faibles. Comment accélérer le mouvement ?
C’est vrai qu’en France, la consommation bio va plus vite que la production. On est obligé d’importer des matières premières de chez nos voisins. Biocoop est à l’abri, parce que nous avons des contrats avec des filières françaises. Comment aller plus vite ? En arrêtant d’écouter les lobbies chimiques qui empêchent le développement du bio. Je crois que le frein principal est là.
Comment Biocoop agit en faveur de la promotion du bio ?
Nous participons à des groupements qui veillent à maintenir une règlementation exigeante pour le bio, à l’abri des pressions des lobbies industriels. Nous lançons des partenariats avec des ONG qui militent pour les valeurs du bio, contre les OGM, l’utilisation des pesticides, etc. Comme Terre de lien, qui gère la terre comme un bien commun, en achetant des terrains pour les transformer en fermes bio. Nous travaillons avec les réseaux Energie partagée et Semences paysannes, qui aide les agriculteurs à rester autonomes en semences, sans OGM ni produits phytosanitaires. Au-delà du bio, nous essayons de ne travailler qu’avec des partenaires du mouvement coopératif, notamment en agriculture, mais aussi dans la banque.
De quelle façon luttez-vous contre le gaspillage alimentaire ?
Dans les magasins, il y a très peu de gaspillage, et nous faisons en sorte de recycler à travers des structures caritatives. Par contre, nous voulons être plus actifs contre le gaspillage aux champs, qui peut dépasser 20 % de la production, c’est-à-dire contre les normes excessives de mise sur le marché des fruits et légumes très calibrés. Nous voulons faire évoluer cette réglementation, pour que les concombres tordus et les petites pommes trouvent une place dans les rayons.
Êtes-vous plutôt optimiste ?
Oui, je le suis parce que la société civile aujourd’hui, en France et dans les pays occidentaux, aspire à un mode de vie différent de celui des 50 dernières années. Elle veut passer à une consommation plus responsable, plus vertueuse pour la planète et l’environnement. Ce système finira par l’emporter dans pas si longtemps, j’en suis convaincu.
BIOCOOP
Propos recueillis par Pascal de Rauglaudre