De la danse à l’entreprise d’insertion innovante
Alors que rien ne l’y prédestinait, Mathieu Boullenger est devenu un entrepreneur social passionné, à la tête d’un groupe innovant de propreté.
Ses revenus de danseur professionnel, même dans des comédies musicales à succès, ne lui suffisaient plus. Il cherchait une activité le matin pour poursuive son activité artistique l’après-midi. Alors il est devenu entrepreneur. En 2005, Mathieu Boullenger transforme la petite affaire de son beau-père en une société de nettoyage orientée sur les prestations écologiques et sociales, Plus-que-parfait. « Je ne connaissais rien à la RSE, ni au développement durable – à l’époque, ces termes n’étaient pas aussi répandus qu’aujourd’hui. J’ai dû tout apprendre sur le tas, suivre des stages et des cours de finances », confie-t-il. En 2009, il récidive avec Le Petit Plus, Entreprise Adaptée qui embauche 80 % de salariés handicapés, spécialisée dans la collecte et la valorisation des déchets recyclables de bureaux.
D’emblée, Mathieu Boullenger cherche à se différencier des « négriers » du secteur, comme il appelle certains de ses concurrents. « Je me suis rendu compte que ça ne coûtait rien d’avoir quelques attentions pour les employés, par exemple en les conviant à des fêtes. » Et ça marche : découvrant que la notion de RSE peut servir d’argument de vente, il obtient les marchés d’entretien des sièges sociaux de quelques-unes des grandes entreprises de la place de Paris, parmi lesquelles Louis Vuitton, Free, BCNS, Arts-et-Métiers, Sodexo, Nestlé Waters, Zurich Assurances, Compagnie des bateaux-mouches…
Il ne faut pas grand chose pour être exemplaire
Peu à peu il développe un goût pour le management : « Je me suis pris au jeu, et j’ai découvert un métier passionnant, qui donne du sens », s’enthousiasme-t-il. Il organise des entretiens annuels des salariés, met en place un système de promotion interne, des plans de formation et des cours d’alphabétisation l’après-midi, après les journées de travail. Il sollicite aussi l’avis des salariés dans le choix des produits : « Ils sont légitimes pour le faire, puisqu’ils manipulent ces produits tous les jours, leur avis est donc important. » Il pratique l’accompagnement social, aide les sans-logis à chercher un logement, et les sans papiers à régulariser leur situation.
Les retours de ses employés n’ont pas manqué : pour beaucoup d’entre eux, c’est la première fois qu’un employeur de ce secteur leur témoignait autant d’attentions. « Ce qu’on fait, c’est pourtant le minimum, mais dans le secteur de la propreté, il ne faut pas grand chose pour être exemplaire ! », s’indigne Mathieu Boullenger. « Je dis à mes employés de ne pas se comparer aux autres entreprises de propreté, mais plutôt aux entreprises d’insertion innovantes. »
Aujourd’hui, son groupe réalise un chiffre d’affaires de près de 3,5 M €, et embauche 160 salariés. Depuis 2007, il a été récompensé par plusieurs prix, dont celui de « l’Entreprise remarquable », qui lui a été remis par la ministre Fleur Pellerin en juin 2013. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault l’a aussi sélectionné en tant que PME exemplaire en matière de RSE.
Au fait, Mathieu Boullenger préfère-t-il danser ou entreprendre ? Danser, répond-il sans hésiter. « Mais j’ai réussi à me passionner pour l’entrepreneuriat, et à donner du sens. Ce sont de belles réussites qui donnent envie de se lever le matin. »
Plusqueparfait
Dominique Pialot & Pascal de Rauglaudre