Sébastien Bétend – L’Optique par Sébastien Bétend
Sébastien Bétend, a créé le premier magasin d'optique éco-conçu de France en intégrant le développement durable au cœur de son métier.
Après 9 années d’expérience acquises à travers 5 boutiques d’optique, en tant que salarié et suite à un licenciement « économique » difficile, Sébastien Bétend, opticien-lunetier a voulu créer un magasin qui soit le reflet de ses valeurs et de ses engagements : en intégrant le développement durable au cœur de son métier d’opticien et en créant « L’OPTIQUE par Sébastien Bétend » (OpSB). Il est également investi à titre bénévole dans divers projets de développement durable.
Vos montures sont certifiées « Fabrication française » et non « Made in France ». Quelle importance accordez-vous à cette différence ?
La différence entre les deux est fondamentale. En effet, les pièces principales d’une monture « Made in France » peuvent être fabriquées en Asie (ou ailleurs) mais uniquement colorées et/ou assemblées et/ou finies en France ; tant que le coût de ce qui est réalisé en France correspond à 45% du prix de revient unitaire de la monture. Mais est-elle forcément fabriquée en France ? Non pas toujours.
J’accorde donc une grande importance à cette distinction car : – La France compte des millions de chômeurs et 30% de la pollution est dû aux transports.
– Par respect du client, je pense que nous avons le devoir de savoir ce que nous vendons, d’en connaître la provenance et la qualité.
Le but de ce projet est de permettre à chaque client, quel que soit son budget, de participer à maintenir voire à créer des emplois en France ; ainsi que de limiter les impacts de la crise et l’empreinte carbone par des achats de proximité.
Il faut savoir que ce travail de recherche et de sélection des « vrais » fabricants français réalisé pour la création de ma boutique est inédit.
Actuellement, « L’OPTIQUE par Sébastien Bétend » est le seul magasin d’optique en France à ne commercialiser que des montures optiques et des verres (de fabrication) certifiés fabriqués en France ainsi que des solaires certifiées de fabrication européenne : montures optiques et solaires à partir de 69 euros !
Votre commerce est labellisé «LVED » par la Mairie de Lyon. Quels critères furent retenus pour vous permettre d’intégrer le club des labellisés ?
Nous avons en effet obtenu « 2 Lions » sur 3 du label « Lyon Ville Équitable et Durable » ou LVED.
Les critères retenus pour intégrer ce club des labellisés sont :
– la qualité de la gouvernance et de la gestion des relations humaines dans l’entreprise,
– l’impact de l’activité sur l’environnement,
– la capacité à dynamiser la consommation responsable,
– la démarche citoyenne et enfin la capacité d’innovation.
C’est un label exigeant qui outre un passage en commission impose de fournir de nombreuses preuves écrites ; et c’est tant mieux car c’est ce qui en fait toute la valeur !
Pour information, outre ce label, j’ai eu la joie de remporter le Trophée Lyon Ville de l’Entreprenariat dans la catégorie « Développement Durable » en décembre 2012 et en mars 2013, le Laurier de l’Innovation commerciale, dans le cadre de la grande semaine du commerce organisée par la CCI de Lyon.
L’Agence Locale de l’Énergie (ALE) s’intéresse particulièrement à votre magasin éco-conçu. Pourquoi ?
L’ALE s’est intéressée au magasin et y a organisé, en juin 2012, une visite officielle pour deux raisons :
– D’abord parce qu’un travail de fond a été réalisé, sur le choix des luminaires, du matériel électroménager, des matériaux et des isolants (fabriqués majoritairement en France puis en Europe) afin de limiter les consommations d’énergie de la boutique et leur empreinte carbone. J’ai également investi dans divers systèmes permettant l’économie de plusieurs centaines de litres d’eau potable par an (voir détails et photos sur le site).
– D’autre part, j’ai été, en 2010-2011, l’un des capitaines de l’équipe lauréate du concours «Familles A Énergie Positive» (FAEP), organisé par l’ Agence Locale de l’Énergie (ALE) ; concours permettant à des citoyens, regroupés au sein d’équipes, d’acquérir et de mutualiser des connaissances ainsi que de bonnes habitudes, dans le but de réduire leur consommation d’énergie au quotidien.
Je pense que cet investissement personnel ayant eu lieu avant le début de mon projet pro, a ajouté de la crédibilité à la sincérité et à l’engagement fort de mon projet professionnel.
Le jour de la visite de ma boutique par l’ALE, j’ai été à la fois surpris et fier d’apprendre par le chargé de mission que c’était la première fois en douze ans qu’il faisait visiter un commerce sur toute l’agglomération lyonnaise !
Vous dites « pour créer un tel projet, j’ai pris des risques et fait des sacrifices ». Sociaux, environnementaux, économiques ?
Je crois vraiment qu’il n’y a pas de projet réel et sincère de bien commun sans risques et sans sacrifices.
Le risque est principalement économique.
Tout d’abord, j’ai fait le choix de réaliser moins de marges que si je vendais des produits asiatiques.
J’ai également pris le risque de boycotter des grandes marques qui se vendent très bien mais qui ne correspondent pas à ma charte. J’ai voulu « trancher dans le vif » et n’ai pas choisi de vendre 50% de produits français et 50% de grandes marques fabriquées en Asie : j’ai pensé « valeurs » avant de penser « bénéfices ».
Un autre risque consiste à créer un magasin unique en France sans savoir s’il va fonctionner ou pas.
Mais tous ces efforts ont permis de transformer une partie de mes valeurs en actes, et contribuent à mon bonheur. Je dis « une partie » car le Développement Durable n’est pas un but mais un cheminement pour le bien-être de nos générations et de celles à venir.
Chacun de nous pourra toujours travailler à « être plus » et à « faire plus » là où la société de consommation nous propose surtout d’ « avoir plus ».
Avez-vous autre chose à ajouter ?
Je souhaiterais ajouter un mot au nom de tous mes confrères opticiens qui, comme moi, travaillent à la fois consciencieusement et de manière honnête.
Certes, la profession a connu et connaît encore des abus de la part de nombreux confrères :
– des marges intolérables notamment grâce à des prix de vente exagérés de certains produits asiatiques bon marché.
– de nombreuses facturations abusives, qui ont largement contribué à éveiller, à juste titre, la vigilance des mutuelles, et à diminuer les remboursements des bénéficiaires.
Récemment, les opticiens en ont pris pour leur grade. Mais il ne me semble pas juste que ceux, qui comme moi, réalisent des marges équitables et qui refusent absolument de réaliser des fausses factures que leur demandent certains clients (quitte à ce qu’ils s’en aillent et le fassent ailleurs, comme ça m’est déjà arrivé plusieurs fois) soient mis dans le même panier.
Il faut savoir aussi que nous ne sommes pas des « marchands de lunettes » : nous apportons une expertise tant technique qu’esthétique dans le choix de la monture et des verres.
Pour ma part, je passe beaucoup de temps avec un client qui vient s’équiper dans ma boutique.
Par exemple pour un équipement en verres progressifs : ¾ d’heure à une heure minimum pour le choix de l’équipement mais aussi pour la vérification de la correction et pour les mesures qui permettront un bon confort lors de la livraison de sa paire de lunettes.
Si le (la) client(e) arrive dans ma boutique avec une monture en bon état, je ne cherche pas forcément à lui en revendre une nouvelle mais je peux lui proposer de monter ses nouveaux verres sur l’ancienne. C’est ça aussi le Développement Durable.
C’est aussi et surtout adopter une attitude sincère, honnête et droite.