Le capital immatériel de l’entreprise : une source d’énergie renouvelable !

« Nous vivons une mutation majeure dont peu d’acteurs ont pris la mesure : celle du déplacement de la valeur et de l’avènement de l’immatériel, » martelait Laurent Habib, Président d’Euro RSCG C&O et Président de l’Observatoire de l’Immatériel dans une conférence organisée par la SFAF* autour du thème : « comment valoriser le capital immatériel de l’entreprise ».

« Nous vivons une mutation majeure dont peu d’acteurs ont pris la mesure : celle du déplacement de la valeur et de l’avènement de l’immatériel, » martelait Laurent Habib, Président d’Euro RSCG C&O et Président de l’Observatoire de l’Immatériel dans une conférence organisée par la SFAF* autour du thème : « comment valoriser le capital immatériel de l’entreprise ».

Ce grand défenseur de cette économie de la connaissance ne cessait de mobiliser l’assemblée autour de ces nouveaux enjeux. Aujourd’hui, la véritable richesse n’est plus concrète, elle est abstraite. C’est notre capacité à innover, à créer des concepts et à produire des idées qui est devenue l’avantage compétitif essentiel.

« Les nouveaux business models ont construit leur succès autour d’une marque, des modalités d’acquisition de biens hétérogènes, de la création d’une communauté… les acteurs traditionnels n’ont pas encore intégré ces leviers de création de richesse. Exit les produits ou les usines. La valeur d’une entreprise s’est considérablement déplacée sur les actifs immatériels que sont les marques, les savoirs, les brevets, les systèmes d’organisation, la culture, le capital des talents… La valeur de votre iPhone ne repose pas sur l’objet mais sur les applications qui lui donnent vie. C’est ce qu’on appelle la valeur d’usage. »

Car à entendre l’intéressé, les changements que nous sommes en train de vivre sont considérables : « les règles de la concurrence évoluent dans cette nouvelle économie. Prenez par exemple le thème de la mobilité. Quels seront les grands gagnants de ce marché demain ? La ville, la RATP, Peugeot ? L’économie de l’immatériel a déplacé les règles de la concurrence ». La richesse d’une entreprise repose moins aujourd’hui sur la vente d’un bien que sur la confiance qu’elle entretient avec ses parties prenantes. Et inutile de camper sur ses positions, ses acquis et protéger l’existant. Mieux vaut pour un décideur tirer parti de ces mutations en faisant évoluer les comportements et les mentalités en interne.

Changement de modèle

Que faire pour accompagner ce mouvement et profiter de ce nouveau relais de croissance ?
Changer de réflexe, changer d’échelle, changer de modèle… répondent en substance les conférenciers.

Côté grandes entreprises, « nous devons intégrer l’immatériel dans la gouvernance institutionnelle et opérationnelle de l’entreprise » recommande Marie-Ange Andrieux, spécialiste de l’immatériel et directeur des partenariats chez Deloitte. Nommer un top manager en charge de cette veille au Conseil d’Administration, intégrer cette dimension au sein du Comité des rémunérations en indexant par exemple des critères extra financiers dans la politique de rémunération des collaborateurs, mettre en place un management de l’immatériel car « cette notion ne se décrète pas, elle se vit » rappelle l’intéressée.

Dans les entreprises plus modestes, désigner une personne en charge de ces actifs pour gérer et sécuriser le patrimoine de la marque, le capital fournisseur ou l’innovation, s’avère être un choix judicieux.

Des changements culturels sont également à opérer chez les investisseurs et plus globalement au sein de la communauté financière. « La valeur des entreprises est à 2/3 immatérielle et cette évolution n’est pas prise en compte par la bourse » déplore Eric Galiègue, fondateur d’une agence de notation d’un nouveau genre, -Reference Value Services-. Cet analyste financier a mis au point une méthode d’évaluation susceptible de mesurer la performance « holistique » d’une entreprise cotée ou non, qui ne repose pas seulement sur sa valeur boursière très court-termiste mais aussi sur la pertinence de sa stratégie, son environnement économique et plus globalement sa santé, à travers une série d’indicateurs extra financiers plus long terme.

Enfin, l’innovation est un concept à revisiter dans l’hexagone. Aujourd’hui, seule l’innovation industrielle et technologique est reconnue et valorisée sur le territoire au détriment de l’innovation dans les services, l’innovation sociale et plus globalement l’innovation inhérente à ces nouveaux usages. Charge à Oséo d’accompagner ces mutations.

Le social commence à entrer dans les grilles d’analyse de cet organisme public d’aide à l’innovation. Une première expérience pionnière existe à travers le fonds d’innovation non technologique en Nord Pas de Calais (doté de 4 M€), destiné aux projets sortant du cadre habituel de l’innovation (innovation d’usage, innovation sociale, création artistique…) relate en substance une note du Mouves –Mouvement des Entrepreneurs Sociaux- qui pratique un lobbying actif pour promouvoir l’innovation sociale dans l’hexagone. Un impératif quand on sait que les pays émergents ont déjà fait de cette économie de l’immatériel l’un de leurs principaux leviers de croissance. « La Chine est aujourd’hui le premier pays dépositaire de brevets dans le monde. Nous sommes passés du Made in China ou Design in China » rappelle Marie-Ange Andrieux.

Sandrine L’Herminier
Consultante, experte RSE –responsabilité sociétale de l’entreprise-

SFAF – Société Française des Analystes Financiers

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