L’économie circulaire à la mode du Jura

Depuis une dizaine d’années, Juratri a bâti un modèle entrepreneurial solide qui conjugue avec succès insertion, solidarité et protection de l’environnement.



A priori Juratri est une PME de recyclage tout à fait normale. Installée dans l’agglomération de Lons-le-Saunier, dans le Jura, elle réalise un chiffre d’affaires annuel de 6,8 millions d’euros, et emploie 115 personnes. Mais à bien y regarder, elle n’est pas si « normale ». Elle présente en effet deux particularités.

La première, c’est sa finalité. « Depuis son lancement, Juratri est une entreprise d’insertion : elle observe les codes et les règles de l’entreprise, sur les plans de la fiscalité, des conventions collectives, des règles sociales, etc., explique Matthieu Grosset, son directeur général. Mais nous avons constitué une équipe dédiée qui aide à lever les freins à l’emploi de nos salariés restés trop longtemps éloignés du marché du travail. » Juratri a aussi mis sur pied une agence d’intérim spécialisée dans le soutien aux personnes en insertion.

La deuxième particularité tient à sa gouvernance : Juratri est une Scop, une société coopérative et participative. Ses salariés sont ses actionnaires, et ils participent aux grandes décisions stratégiques relatives aux investissements de la société, au positionnement commercial, et même à l’élection du Pdg.

Depuis une dizaine d’années, l’entreprise, qui traite environ 40 000 tonnes de déchets par an, s’est ouverte au démantèlement des déchets électroniques. « Nous nous efforçons de mettre en œuvre des procédés d’économie circulaire, poursuit Matthieu Grosset. 94 % de ce que nous trions est valorisé pour la réutilisation de la matière, et le reste est valorisé dans la prod. À la fin, 100 % des déchets que nous collectons sont valorisés. »

Rester compétitif

À l’heure où le secteur du tri et du recyclage devient de plus en plus concurrentiel et concentré, avec en particulier davantage d’automatisation, Juratri s’est fixé deux objectifs : rester compétitif et continuer à créer de l’emploi d’insertion. « Nous essayons de trouver des process qui permettent de maintenir l’emploi, assure Matthieu Grosset. Dans notre secteur, la qualité du tri joue un rôle essentiel dans la valorisation des matières premières. Du coup, la vente se fait à un meilleur prix, ce qui nous permet d’être compétitifs et de créer de l’emploi. »

En 2011, Juratri a réalisé trois millions d’euros d’investissements et s’apprête à en rajouter un million pour optimiser les process, améliorer les conditions de travail et développer les logiques d’économie circulaire dans le territoire. Elle est à l’origine de Clus’Ter Jura, qui a été labélisé par l’État comme pôle territorial de coopération économique : « C’est pour nous une façon ‘d’externaliser’ notre R&D, pour qu’elle ne profite pas seulement à Juratri, mais bien à l’ensemble des acteurs économiques du territoire. »

Au bout de deux ans chez Juratri, les salariés sortent avec une expérience minimale d’opérateurs de production. « On dit souvent qu’ils n’ont pas envie de travailler, et qu’ils sont chômeurs parce qu’ils le veulent bien, mais chez nous, ils travaillent comme dans l’industrie, ils démarrent à 6 h du matin, c’est-à-dire qu’ils se sont levés à 4h30, observe Matthieu Grosset. S’ils arrivent au bout d’un parcours chez nous, ça veut dire qu’ils l’ont fait pendant 24 mois. C’est bien la preuve qu’ils en veulent et ont envie de travailler. » À ceux qui le souhaitent, Juratri offre aussi la possibilité d’une qualification supplémentaire pour trouver plus facilement un emploi. Certains en ont trouvé dans l’industrie, d’autres ont complètement changé de secteur.

JURATRI


Texte Pascal de Rauglaudre

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