AFYREN : une réponse biosourcée à la fin du pétrole
Le 11 juin, AFYREN, une startup qui produit des acides organiques biosourcés, rejoint le consortium européen Bio-based Industries. Un soutien précieux qui va lui permettre d’accélérer l’industrialisation de sa production, après six années de R&D.
Bonne nouvelle pour AFYREN : le 11 juin, elle rejoint le consortium Bio-Based Industries (BIC) au sein du projet AFTER-BIOCHEM, qui rassemble douze acteurs clés de la bioéconomie. Une récompense bien méritée pour cette startup française qui a développé une solution circulaire et bas carbone de production d’acides organiques naturels.
Le consortium BIC regroupe des entreprises européennes spécialisées dans les solutions biosourcées, qu’il aide à répondre à des appels à projet et à obtenir des financements. En le rejoignant, elle bénéficiera du soutien de l’Union Européenne pour passer à la phase d’industrialisation du processus qu’elle a développé.
L’aventure AFYREN a débuté en 2012, après plusieurs années de travaux de recherche lancés par Jérémy Pesstio, chercheur en microbiologie et chimie. L’arrivée de Nicolas Sordet à la présidence d’AFYREN en 2014 a permis d’accélérer le développement économique d’AFYREN. L’enjeu pour les cofondateurs consiste à transformer la startup en succès industriel.
Aujourd’hui, AFYREN compte 25 collaborateurs sur deux sites à Lyon et à Clermont-Ferrand. Son idée de départ consiste à remplacer les acides organiques d’origine pétrolière par des alternatives naturelles biosourcées à partir des coproduits issus de la transformation de la betterave à sucre.
Les acides organiques servent d’ingrédients dans une multitude d’applications : production alimentaire humaine et animale (arômes, conservateurs), cosmétiques (solvants pour vernis à ongle), pharmacie… Leur marché mondial représente un volume de 15 milliards de dollars, en forte croissance.
Neuf brevets déposés
Le principe imaginé par AFYREN, et qui a déjà fait l’objet de neuf brevets, est assez simple. Pour produire du sucre, la betterave est râpée puis trempée dans l’eau chaude, dans laquelle le sucre se dilue.
À la fin de cette étape, il reste la pulpe, d’ordinaire recyclée dans l’alimentation animale ou envoyée dans des usines de méthanisation, et la mélasse, une sorte de jus sucré qui cristallise en chauffant. Mélasse et pulpe sont versées dans des cuves de fermentations avec des bactéries qui vont les dégrader et produire des acides organiques standards, sous la forme de liquides transparents.
Les molécules d’acide sont ensuite extraites par distillation, purifiées et séchées. « Après six ans de R&D, nous avons mis au point un procédé pour les obtenir sans odeur ni couleur », explique Nicolas Sordet, président d’AFYREN. « Encore mieux : nous avons atteint la qualité exigée par les industriels et nous pouvons leur garantir un produit 100 % biosourcé naturel. »
Dès le départ s’est posée la question de la compétitivité du projet, condition indispensable à sa pérennité. La solution : produire des volumes importants, ce qui ne peut se faire qu’en passant à l’échelle industrielle dans une usine.
Après avoir levé des fonds auprès d’investisseurs spécialisés et sollicité des aides publiques, AFYREN va donc lancer les travaux de sa première usine en Lorraine à l’automne. Objectif : démarrer la production fin 2021 pour atteindre 16 000 tonnes par an (contre 200 000 tonnes pour les acteurs conventionnels de la pétrochimie).
Pas d’impact sur l’environnement
Le challenge est d’autant plus difficile qu’AFYREN s’était fixé deux lignes rouges : les bactéries ne sont pas modifiées génétiquement, et les matières premières n’entrent pas en concurrence avec la production de nourriture pour les hommes.
Par ailleurs, AFYREN a mis un point d’honneur à développer un mode de production zéro déchet sans impact sur l’environnement. Les résidus du process sont valorisés sous forme d’engrais, et l’eau qui sert à purifier les acides organiques est recyclée. « Notre projet montre qu’une industrie compétitive et respectueuse de l’environnement est possible, ce qui plaît aux industriels, de plus en plus sensibles aux solutions naturelles. »
Au passage, Nicolas Sordet ne tarit pas d’éloge sur le système français de soutien à l’entrepreneuriat : « Après des années à l’étranger, j’ai été surpris par la dynamique de l’écosystème des startups en France. Nous avons trouvé tout ce dont nous avions besoin pour notre projet : de l’agriculture, des entreprises d’ingénierie, des solutions de financement de l’innovation, notamment celles de Bpifrance. Je le dis d’autant plus facilement que j’ai vu comment ça se passe ailleurs ! »
Comment AFYREN produit des acides organiques
Pascal de Rauglaudre